Symboliquement, c'est le jour même de la Journée mondiale de l'eau que le ministère de l'Écologie a réalisé son rapportage* auprès de la Commission européenne sur la mise en oeuvre de la directive-cadre sur l'eau (DCE). Le chantier est de taille et mobilise 27 milliards d'euros pour atteindre en 2015 le bon état des 574 masses d'eaux souterraines et de 11 523 masses d'eaux de surface des douze bassins français. Rappelons toutefois que la DCE prévoit des dérogations pour des raisons techniques (manque de technologies efficaces et rapidement actives), naturelles (inertie du milieu) et économiques (coûts disproportionnés).
Pour les eaux souterraines, le problème concernera moins l'aspect quantitatif que qualitatif, car seules 59 % de ces masses d'eau ont un bon état chimique. Or, l'inertie des eaux souterraines rend difficile leur amélioration, ce qui explique que 36 % d'entre elles disposent d'une dérogation à ce titre.
À l'inverse, l'état des eaux de surface est moins bon, mais peut évoluer plus rapidement. Ainsi, seules 45 % de ces masses d'eau sont en bon état chimique et 45 % en bon état écologique. Les dérogations ne sont envisagées que pour 17 % d'entre elles en raison de leur état chimique et pour 36 % en raison de leur état écologique (ce qui représente, à 3 % près, l'objectif du Grenelle de l'environnement).
La feuille de route française pour atteindre les objectifs de la DCE est ambitieuse. Elle pourra s'appuyer sur la mise aux normes des stations d'épuration (les six dernières collectivités doivent commencer leurs travaux cette année). Mais plusieurs points inscrits dans le Grenelle de l'environnement pourraient freiner l'atteinte du bon état : la difficile maîtrise foncière pour protéger les 500 captages prioritaires, l'absence de maîtres d'ouvrage pour porter des projets concernant les zones humides, le télescopage du plan de restauration de la continuité écologique avec l'objectif de développer les énergies renouvelables. Sans parler du Plan écophyto 2018 pour la réduction de 50 % de l'usage des pesticides, qui vient de prendre du plomb dans l'aile avec les récents propos du président Sarkozy en faveur d'un allégement des contraintes environnementales pour les agriculteurs. Un bien mauvais présage pour la réforme de la politique agricole commune de l'Europe en 2013, alors que la mise en cohérence des politiques publiques de l'eau et de l'assainissement constitue la clé de voûte de ce combat.