L'utilisation des intrants agricoles, et notamment les pesticides, a permis de répondre à la demande accrue et urgente de production alimentaire après la deuxième guerre mondiale, en assurant une production plus régulière et des rendements plus élevés. Les impacts écologiques et sanitaires liés à l'utilisation de ces produits ont cependant conduit l'Europe, et la France, à engager des programmes de réduction d'usage des pesticides, surtout pour réduire la contamination des ressources en eau. « Réduire de 50 % l'usage des pesticides d'ici à 2018, si possible », tel est l'objectif fixé par la France avec le Grenelle de l'environnement, dans le cadre de la directive-cadre eau. L'étude Écophyto R et D, qui vient d'être rendue publique, offre déjà plusieurs pistes pour s'approcher de cet objectif.
PLUSIEURS SCÉNARIOS
Ces travaux font suite à l'expertise collective ESCO qui, dès 2005, mettait en évidence la possibilité d'obtenir des systèmes de culture satisfaisants malgré une utilisation réduite des traitements chimiques. L'étude Écophyto R et D va plus loin et observe les effets potentiels, économiques et agronomiques, de plusieurs scénarios d'échelle nationale visant à réduire le recours aux pesticides. Divers profils ont été pris en compte pour comparer la situation actuelle aux objectifs envisagés, depuis l'agriculture intensive qui ne limite pas le recours aux pesticides jusqu'à l'agriculture biologique, en passant par des approches raisonnées plus ou moins poussées.
2006, ANNÉE MOYENNE
Les filières « grandes cultures » et viticulture, qui consomment 80 % des pesticides en France, ont fait l'objet d'études récentes et, dans ces domaines, les données sont statistiquement représentatives. À l'inverse, les fruits et légumes, qui utilisent 10 % des pesticides, ne bénéficient pas de cet éclairage, et l'étude a seulement permis de réunir des données dispersées, qui nécessiteront d'être approfondies. Les résultats ont par ailleurs été obtenus sur la base d'une seule année - 2006 - considérée comme « moyenne », ce qui en restreint la portée. Malgré ces limites, clairement présentées par les rapporteurs de l'étude, les résultats donnent des indications sur l'ampleur des effets que peuvent produire des mesures simples. Ainsi, l'application plus répandue des principes de l'utilisation raisonnée des pesticides permet de réduire leur usage de 3 % (pois) à 40 % (maïs) sans affecter le niveau de production pour la majorité des cultures, tout en maintenant ou même en augmentant les marges correspondant à ces productions. En modifiant plus profondément les habitudes de cultures, il est possible de réduire l'utilisation de pesticides jusqu'à 76 % par rapport à l'agriculture intensive, tout en maintenant les marges. Mais ces pratiques modifient significativement les volumes de production pour chaque type de culture et pourraient poser problème à l'échelle nationale.
L'étude porte aussi sur les approches possibles pour convaincre les agriculteurs de changer leurs habitudes, par le biais de taxes et/ou de subventions. Quels que soient l'option choisie et le niveau de réduction envisagé, les auteurs soulignent que seules l'information et la formation assureront le succès de ces nouvelles pratiques agricoles.