La région Île-de-France, le conseil général de Seine-et-Marne et l'agence de l'eau Seine-Normandie ont financé trois zones humides artificielles chargées d'épurer les eaux de surface avant de rejoindre la nappe phréatique de Champigny (Seine-et-Marne). Ce projet est piloté par l'association Aqui'Brie, en partenariat avec le Cemagref, les agriculteurs et le syndicat intercommunal pour l'aménagement et l'entretien du ru d'Ancoeur.
UNE ZONE POUR PIÉGER LES PESTICIDES
« La nappe phréatique de Champigny présente des niveaux particulièrement bas et des zones d'engouffrement (1) importantes. Cette recharge par les eaux superficielles représente par endroits jusqu'à 70 %. Or, ces eaux de surface transitent à travers des zones agricoles cultivées et sont chargées en nitrates et en pesticides », explique Jean Dey, vice-président au conseil général de Seine-et-Marne et président de l'association Aqui'Brie.
Le Cemagref a proposé la solution des zones tampon humides artificielles (ZTHA). Une station de mesures a permis d'obtenir des résultats sur 2006 et 2007. Après discussion avec dix agriculteurs, trois d'entre eux sont aujourd'hui maîtres d'oeuvre. Les zones humides artificielles (10 000 m3 sur 400 ha) ont été créées sur leurs terres.
L'eau du ru qui récolte les eaux agricoles drainées est détournée grâce à un système de vannage géré par les agriculteurs, en accord avec le syndicat intercommunal, maître d'ouvrage. L'eau y reste environ une semaine en moyenne (selon l'hydrologie), afin d'abattre les polluants (de 20 à 90 % selon les molécules), grâce à l'action de la lumière et des micro-organismes. Ces aménagements sont plantés de différents macrophytes, dont le but est de ralentir l'écoulement des eaux. « Le dispositif retenu devait rester rustique, sans apport d'électricité par exemple », commente Julien Tournebize, de l'unité de recherche Hydrosystèmes et bioprocédés du Cemagref.
Le Cemagref travaille sur les ZTHA depuis 2005 à titre expérimental (en Indre-et-Loire, en Seine-et-Marne) dans le cadre du programme européen Life Arwet. Initié en octobre 2006 pour une durée de trois ans, il a donné lieu à la publication d'un guide technique fin 2010. Ces ZTHA commencent à sortir des laboratoires et se développent en France, notamment grâce au réseau Omer (ouvrages de maîtrise des écoulements en milieu rural). Les ZTHA de Champigny sont les premières qui se situent juste en amont d'une zone de recharge d'une nappe souterraine.
CADRE RÉGLEMENTAIRE À CONCRÉTISER
Le Cemagref travaille sur la phase de mesures (entrée-sortie) à l'échelle d'un bassin versant. Mais pour obtenir des résultats concrets, il faudrait créer beaucoup plus de zones tampon. « Or, le problème à ce jour est de concrétiser le cadre réglementaire avec les agences de l'eau et le ministère de l'Agriculture. Car, contrairement aux bandes enherbées, les ZTHA ne sont pas encore reconnues comme mesures agri-environnementales (MAE) et les agriculteurs doivent sacrifier du foncier sans subventions complémentaires de la part de la politique agricole commune (PAC). Il faut donc jouer uniquement sur la fibre citoyenne », regrette Julien Tournebize. Sans que cette solution dédouane des efforts à effectuer en amont.