Les éléments géogéniques sont des composés chimiques, comme l'arsenic, le sélénium, le fluor ou le manganèse, naturellement présents dans les aquifères ou dans les sols. Ils peuvent néanmoins engendrer de graves problèmes environnementaux et sanitaires. En juillet dernier, un congrès international organisé par le Bureau des recherches géologiques et minières ( BRGM) a réuni 120 participants de 23 pays à Orléans. Objectif : synthétiser les résultats du programme européen de recherche « Éléments géogéniques dans les eaux souterraines et les sols : un réseau de recherche et de formation (Aquatrain) », qui se termine après quatre ans de travaux.
TESTS ET AMÉLIORATION DES CONNAISSANCES
En Europe, les régions concernées par la présence de ces composés sont essentiellement volcaniques. Il arrive ainsi que des petites communes du Massif central subissent de brèves suspensions de la distribution d'eau en raison d'un taux trop élevé d'arsenic ou de sélénium. Des problèmes rapidement traités, mais qui laissent envisager les conséquences de la remise en solution de ces éléments jusqu'alors piégés dans les sédiments du fait d'une surexploitation des nappes due au réchauffement climatique.
En France, la contamination des eaux par les polluants géogéniques est très disparate, mais « sans vouloir être alarmiste, la situation pourrait se dégrader en cas de pompage accru », prévient Romain Millot, spécialiste des aquifères profonds et responsable d'Aquatrain au BRGM. Il s'agit donc de mieux connaître leurs teneurs dans les eaux, les sols et sédiments, les facteurs qui les contrôlent, la manière dont ils sont transférés vers les populations, les techniques de remédiation utilisables, et les recommandations scientifiques à apporter aux politiques gérant les ressources en eau.
Ce sont précisément les objectifs du projet Aquatrain lancé début 2007, regroupant quinze universités, instituts et organismes de recherche européens, et financé à hauteur de 3,5 millions d'euros via le sixième programme-cadre de la Commission européenne. Des méthodes de remédiation ont ainsi par exemple été testées avec succès dans les Balkans, où l'arsenic présent dans l'eau a pu être piégé par précipitation des oxydes de fer dissous. De jeunes chercheurs ont par ailleurs été formés en vue de créer un réseau scientifique européen capable d'établir des états des lieux de la pollution avant de définir des diagnostics et des stratégies d'intervention.
UN PROJET DE PORTÉE MONDIALE À SUIVRE
À l'occasion du congrès d'Orléans, « de nouvelles techniques de dépollution prometteuses ont été présentées, comme une de bioremédiation via des bactéries permettant de précipiter l'arsenic et le sélénium afin de les piéger », annonce Romain Millot. Les conclusions d'Aquatrain seront connues à la fin de l'année. Un projet de portée mondiale car les outils et connaissances qui en résulteront pourront être utilisés partout où l'exposition des populations aux polluants géogéniques pose problème. Améliorant en outre les méthodes d'identification de l'origine des contaminations, il permettra de mieux quantifier les pollutions et de déterminer leurs origines. De quoi pouvoir mettre en place des actions correctives.