1-Après l'abandon de la taxe carbone, que vous avez contribuée à élaborer, quelles peuvent être les conséquences sur les objectifs du « facteur 4 » ?
La taxe carbone aurait dû entraîner une baisse des émissions des ménages, des industries hors quotas et des services. Là, des secteurs entiers vont se retrouver sans signal clair sur le prix. Mais ce vaste débat a sensibilisé les Français, et il existe d'autres dispositifs pour atteindre le « facteur 4 », comme l'isolation des logements, privés comme sociaux. Il faudra faire des bilans d'étape pour s'assurer que l'on progresse vers l'objectif.
2-Le ministère de l'Écologie relativise cet échec en mettant en avant 70 mesures relevant de la fiscalité environnementale. Seront-elles suffisantes pour y parvenir ?
Il existe en effet de nombreuses mesures, par exemple le bonus-malus automobile. Mais le chemin pour accomplir cette mutation vers une fiscalité environnementale sera long. Notre modèle est trop consommateur d'énergie pour être généralisé à la planète. Nous ne nous donnons pas les outils pour maîtriser cette consommation. Déjà, le prix du pétrole augmente. La taxe carbone proposait une manière active de se préparer à moins consommer. Là, on va subir de façon passive cette hausse des prix, et ce sont les plus fragiles qui seront les plus touchés.
3-Quelles sont les autres pistes ?
Modifier la fiscalité sur les énergies fossiles - dans l'industrie, c'est la consommation de l'énergie qui est taxée - pourrait avoir un effet proche de la taxe carbone. Hormis sur un point : le principe de neutralité fiscale, qui établissait un cercle vertueux pour réduire les émissions de CO2. Au niveau communautaire, une taxe carbone est peu vraisemblable, mais un mécanisme de taxe carbone aux frontières serait utile pour restaurer la compétitivité des entreprises de l'industrie lourde, par rapport aux produits importés non concernés par les quotas de CO2. Et c'est, a priori, OMC-compatible. Autre possibilité, la modification de la directive de 2003 sur la fiscalité. Un indice lié à la production de CO2 pourrait être ajouté dans le calcul de l'accise des produits non concernés par les quotas d'émissions de gaz à effet de serre.