La finance solidaire n'est pas qu'un voeu pieu. C'est aussi du concret, du moins lorsque des mécanismes efficaces sont mis en place pour servir sa cause. Le Crédit coopératif, qui n'en est pas à son premier coup d'essai, montre l'exemple grâce à un dispositif maison. « Il est reproductible ailleurs, motive son président Jean-Louis Bancel. Nous avons contacté d'autres banques car nous sommes ouverts à l'idée de réunir du monde autour de cette initiative et prêts à chercher une appellation et une méthodologie communes. Mais pour l'instant, cela n'a pas pris. » Lancé en 2011, dans la foulée du sommet des Objectifs du Millénaire pour le développement, ce mécanisme consiste à prélever 0,01 % du montant total des opérations de change de quatre principales devises (livre sterling, dollar, euro, yen), afin de le reverser à des acteurs reconnus de l'aide au développement.
Rien à voir avec le projet de taxe dite Sarkozy sur les transactions financières inspiré de la fameuse « taxe Tobin » (qui n'avait pas d'objectif de solidarité), ni avec du mécénat classique (même si dans l'esprit on s'en rapproche). « Plus qu'une taxe, c'est une contribution volontaire. Elle ne coûte rien au client, on rogne sur nos marges de banquier pour supporter son coût », explique Pierre Valentin, directeur général délégué en charge des finances. Le taux de 0,01 % n'a pas été choisi par hasard. « Préconisé dans les études sur les financements innovants, il permet de dégager un montant significatif ,sans toutefois déstabiliser les marchés de change. Ces marchés ont bénéficié des effets positifs de la globalisation. Il est juste de les mettre à contribution. Mais le but n'est pas de ralentir le volume des transactions », ajoute-t-il.
Les débuts sont plutôt prometteurs. En 2011, cette contribution a généré 82 000 euros. Trois projets étaient en lice pour bénéficier. La banque a retenu celui de l'association Geres (Groupe énergies renouvelables, environnement et solidarités). « C'est un projet de réhabilitation énergétique dans l'Himalaya indien. Les températures y sont glaciales l'hiver, mais l'ensoleillement exceptionnel. Cela nous semblait pertinent d'aller sur le terrain de l'énergie, un enjeu auquel on prête souvent moins d'attention que la santé, l'alimentation ou le développement économique », commente Jean-Louis Bancel. Déjà engagé, ce projet repose sur un partenariat avec cinq ONG locales. « On leur apporte des financements, des méthodes de travail et des techniques d'efficacité énergétique pour construire 1 000 maisons solaires passives d'ici à 2013 », précise Alain Guinebault, délégué général du Geres. L'heureux élu bénéficiera durant deux ans de cette contribution. En 2012, elle devrait atteindre 100 000 euros, tout comme l'année suivante.