Être réaliste. Tel a été le leitmotiv de l'Ademe pour son exercice de prosp e ctive. L'agence a versé deux scénarios au débat national sur la transition énergétique. L'un prolonge la trajectoire actuelle jusqu'en 2030 en appliquant une politique volontariste, notamment de maîtrise de la demande. L'autre suppose le Facteur 4 atteint en France en 2050 et remonte le temps. Leurs particularités ? Les scénarios de l'Ademe mettent l'accent sur la consommation, là où d'autres étudient plutôt la production d'énergie. Certes, ce type d'exercice repose sur des hypothèses.
L'agence s'appuie ainsi sur le scénario de fécondité « haute » de l'Insee (74,1 millions d'habitants en 2050). Elle retient une croissance économique de 1,8 % par an et une part constante de l'industrie dans le PIB. Elle suppose aussi que la part du nucléaire dans le mix électrique sera de 50 % en 2030. Néanmoins, « les conditions retenues sont atteignables », estime Virginie Schwartz, directrice exécutive des programmes de l'Ademe. Covoiturage, autopartage, prêt à taux zéro, certificats d'économie d'énergie… « Ce qui est intéressant, c'est que les outils nécessaires existent déjà. La dif ficulté sera plutôt de les mettre en œuvre », constate François Loos, président de l'Ademe. La principale conclusion est le rôle crucial à court terme du secteur du bâtiment. « La rénovation dans le résidentiel et le tertiaire représente 60 % de la baisse de la consommation nécessaire entre 2010 et 2030 », chiffre Virginie Schwartz. À confort égal, la demande pour le chauffage pourrait ainsi être réduite de 35 à 10 millions de tonnes équivalent pétrole dans l'intervalle. « Ce gain libérerait des ressources renouvelables pour la mobilité », décrypte Benjamin Topper, chargé de mission. Car si les transports présentent un fort potentiel de réduction des émissions, leur inertie au changement est plus lente. L'Ademe compte sur les services de mobilité partagée, l'électricité et la biomasse (méthanisation et biocarburants de deuxième génération) pour se passer du pétrole à terme.
Pour l'étape 2030, l'hypothèse est faite d'un plan de mobilisation ambitieux de la ressource forestière, permettant d'évoluer d'un taux de prélèvement sur l'accroissement naturel de 48 %, aujourd'hui, à 75 %. L'installation de 600 méthaniseurs par an (deux fois moins qu'en Allemagne) générerait 2,7 millions de TEP injectés dans le réseau de gaz, 1,2 million pour usage direct de chaleur, 0,7 million pour la production électrique et 0,4 million injecté dans le réseau de chaleur en 2030. À cette même date, la capacité éolienne atteindrait en France 34 GW sur terre et 12 GW en mer. La puissance délivrable par les stations de transfert par pompage passerait de 5,5 à 7 GW. La capacité photo voltaïque serait de 33 GW. l