Les obligations et nouvelles normes issues des Grenelle 1 et 2 ont significativement hissé le niveau des investissements immobiliers tertiaires « verts », selon l'enquête récemment menée par DTZ, l'un des principaux acteurs mondiaux de l'immobilier d'entreprise. Avec près de 3 milliards d'euros engagés en 2012, ces investissements représentaient 20 % du marché total dans l'immobilier tertiaire. « Les contraintes, mais aussi le succès des labels optionnels tels que la norme HQE, qui représente 80 % du marché français de la certification verte aux côtés des normes internationales Breeam et Leed, expliquent naturellement ces premiers succès », décrypte Magali Marton, corédactrice de cette étude. Ces succès ont néanmoins été entachés de quelques désillusions.
Certains investisseurs et propriétaires ont ainsi appris à leurs dépens que les locataires de biens HQE étaient majoritairement rétifs à accepter la surcote de loyer – parfois de 10 % – qui leur était proposée. De quoi doucher leurs espérances de retour immédiat sur inves tissement… Par ailleurs, la puissance publique s'était certes assignée des objectifs sur le terrain de la performance énergétique, notamment celui de réduire de 38 % la consommation du parc d'immeubles tertiaires d'ici à 2020. Mais de telles cibles ne sauraient se réaliser « sans qu'un système d'incitation-coercition soit installé », estime DTZ. Selon qui une feuille de route « devrait afficher des seuils intermédiaires de réduction de la performance énergétique ». Cette requête pourrait prendre la forme d'un décret. Très attendu par les professionnels et annoncé pour la fin 2012, le texte est depuis resté dans les limbes jusqu'à ce que le gouvernement évoque en septembre sa future publication… en 2014.
« Ce décret devrait idéalement comporter des mesures de bonus-malus à l'attention des propriétaires et des investisseurs », estime Magali Marton, les seuls jeu du marché et registre des bonnes intentions ne suffisant pas à accélérer les investissements verts dans le tertiaire ancien. Bien sûr, les grandes foncières doivent présenter des bilans environnementaux ou se soumettre à des engagements RSE. Elles n'ont donc pas attendu l'instauration de règles contraignantes. Mais, quand bien même ils le pourraient, beaucoup de propriétaires plus modestes n'ont aujourd'hui aucun intérêt économique à investir dans la performance énergétique du parc déjà installé. D'autant que l'État, propriétaire de bureaux, ne donne pas toujours l'exemple. Rappelons qu'un rapport sur la rénovation du parc tertiaire, de Maurice Gauchot, président de la société de conseil CBRE France, avait formulé une recommandation fin 2012 : celle d'incorporer dans le fameux décret un objectif de réduction d'au moins 25 % de la performance énergétique, une cible révisable à la hausse dès 2015. Une telle progression devrait impérativement s'adosser à une structure de financement public-privé, a pointé le groupe de travail « Financements innovants de l'efficacité énergétique » du Plan bâtiment durable. Celui-ci a chiffré la dotation nécessaire à ce fonds dans une fourchette de 1 à 2 milliards d'euros. Encore faudrait-il aussi, soutient Magali Marton, de DTZ, « se doter d'outils performants qui permettent d'évaluer la rentabilité des investissements. » Au regard, par exemple, des logiques de moindre dépréciation des actifs ou de charges d'exploitation et d'entretien plus modestes.