Les chiffres parlent d'eux-mêmes : chaque jour, plus de 160 000 personnes quittent la France, l'Allemagne et la Belgique pour aller travailler au Luxembourg, générant par exemple le passage quotidien de plus de 30 000 véhicules sur l'A31 entre Metz et le Grand-Duché. Or, dans 85 % des cas, le conducteur est seul à bord. « Ce constat a motivé les acteurs de la Grande Région (Lorraine, Luxembourg, Sarre, Rhénanie-Palatinat, Wallonie) à travailler sur un projet commun de politique de mobilité transfrontalière », retrace Jean-Paul Dastillung, vice-président du conseil départemental de la Moselle. L'objectif : étudier, tester et mettre au point des moyens de transports propres, complémentaires aux transports en commun et permettant de diminuer le trafic sur les axes de transit des travailleurs frontaliers.
C'est ainsi que le projet Elec'tra a vu le jour dès 2012. « Notre idée a été de substituer des véhicules électriques à des véhicules thermiques et d'inciter au covoiturage, détaille Jean-Paul Dastillung. Et donc de mettre en périphérie des grandes agglomérations des parcs relais de véhicules électriques. » Le projet rassemblant divers partenaires institutionnels (Institut List, à Luxembourg, Institut Izes et université de Kaiserslautern, en Allemagne) a consisté à mettre au point un concept de parc-relais intelligent, baptisé « e-hub ». Ses atouts : il permet de gérer les flottes de véhicules, leur stationnement et l'approvisionnement en énergie pour leur recharge. « En outre, une très grande enquête d'usage a permis de déterminer les attentes de 7 000 navetteurs, explique François Tanguy, chargé de mission mobilité électrique au conseil départemental de la Moselle. Les partenaires ont alors pu identifier un potentiel d'utilisateurs par zone géographique et faire des projections sur l'utilisation des véhicules électriques. En théorie, nous avons ainsi estimé qu'avec la mise en place de l'“e-hub”, il serait possible de gagner jusqu'à 15 km/h de vitesse de circulation moyenne sur certains axes, en fluidifiant le trafic. » Le projet s'est achevé cette année. Reste à passer de la R & D à la concrétisation des « e-hub ».
En attendant, la Moselle a pris les devants et lancé son propre programme, nommé Moselle Nouvelles Mobilités. Celui-ci vise à créer une délégation de service public afin de disposer de parcs-relais intelligents offrant des services de mobilité électrique pour les frontaliers et également des sites mixtes urbains, un peu sur le modèle d'Autolib' à Paris. « Nous souhaitons voir déployer 200 à 800 véhicules électriques pendant quinze ans », annonce Jean-Paul Dastillung. Le conseil départemental est actuellement en négociation avec les candidats. La convention pourrait être signée d'ici à la fin de l'année et les premières voitures mises en service en 2017. Il appartiendra ensuite aux travailleurs frontaliers et aux Mosellans de s'approprier cette nouvelle forme de mobilité. ACo