LePilote marché mondial du dessalement d'eau Sur le marché de mer est constitué de près de 14 000 usines, totalisant une production de 82 millions de mètres cubes par jour. Des unités qui exploitent soit la technologie thermique, soit des membranes. Dans tous les cas, il s'agit d'extraire l'eau de l'eau salée, avec des taux de conversion bas : 40 % environ pour l'osmose inverse et aux environs de 30 % pour la distillation. La consommation énergétique (tout électrique) de l'osmose inverse a largement diminué entre la fin des années 1970 (8 à 10 kWh alors consommés par mètre cube d'eau produite) et aujourd'hui (4 ou 5 kWh, voire 3 par mètre cube). Les plus gros progrès ont été réalisés en augmentant d'un facteur 5 la perméabilité des membranes et en généralisant les systèmes de récupération d'énergie (ERI) qui atteignent des rendements de 95 à 97 %. « Les marges de progression sont restreintes. Les technologies sont matures », juge Vincent Baujat, directeur général de Sidem, filiale de Veolia spécialisée dans la construction des unités de dessalement.
Aussi, des projets de R & D entendent améliorer les performances du dessalement membranaire. Les deux leaders français, Veolia et Suez ont été retenus par Masdar, l'opérateur énergétique d'Abu
Dhabi, pour développer les énergies renouvelables. Veolia étudie comment réduire de 10 à 20 % le coût de l'osmose. Suez est de son côté impliqué sur deux projets : un programme simule l'alimentation d'une usine de dessalement par énergie solaire, via un apport direct allant de 25 à 100 %, et une collaboration avec la PME française Adionics pour tester d'ici à la fin de l'année le traitement de la saumure d'osmose inverse par le procédé Aquaomnes. « Notre solution change de paradigme. Nous enlevons le sel de l'eau salée par un échange liquide-liquide réalisé par une résine. Sur l'eau de mer, notre approche repose
sur une physique 110 fois moins consommatrice de chaleur que l'évaporation de l'eau de mer », affirme Guillaume De Souza, président d'Adionics.
La solution permet de diminuer de deux à trois fois le volume de saumure produite, améliore le rendement de conversion d'eau du procédé global et son rendement énergétique, réduisant ainsi le coût. Adionics lancera aussi en 2016 un premier site pilote en France pour tester sa solution directement sur l'eau de mer. L'entreprise estime pouvoir baisser à terme les coûts du dessalement de l'eau de mer par deux.
D'autres planchent sur des procédés de rupture via des solutions consommant moins de 3 kWh/m3 et visent le seuil de 1 kWh/m3 , énergie théorique minimale pour dessaler l'eau de mer. Emmanuel Trouvé, fondateur de la société d'ingénierie Nereus-Water, a déposé, en 2014, un brevet sur un procédé de dessalement très basse énergie qui sera exploité par la société SeaLED. « Ni thermique, ni membranaire, nous exploitons une troisième voie qui permet la migration des ions sous l'effet d'un faible champ électrique, mais, à la différence de l'électrodialyse, sans courant ni membranes. Nous avons conçu des microréacteurs dont la géométrie suffit à séparer les flux sous l'effet du champ. Et leur consommation ne dépasse pas 1,4 kWh/m3 », annonce le chef d'entreprise.
Par ailleurs, Montpellier Engineering, créé en 2011 autour d'une technologie de dessalement solaire thermique avec l'université de Montpellier, table sur la commercialisation de sa première unité Dunetec en 2016, au Maghreb. « Nous nous positionnerons sur le marché de petites capacités en site isolé. Pour idée, 20 m3 par jour nécessite environ 150 m2 de capteurs. L'investissement
de départ n'est pas négligeable, mais ensuite le coût de production de l'eau est quasiment nul », assure Laurent Tremel, son président.