La réponse n'a pas tardé, mais est-elle à la hauteur des interrogations ? L'Autorité environnementale vient de publier son avis sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) pour la France métropolitaine. Pour rappel, cette PPE est censée décliner filière par filière, aux horizons 2018 et 2023, les objectifs fixés par la loi de transition énergétique. Y compris pour la baisse des consommations d'énergie.Une nouvelle PPECet avis de l'Autorité environnementale s'avère relativement critique, mais le ministère de l'Environnement le juge « positif ». Par communiqué, le ministère assure que les « remarques » de l'Autorité environnementale, « ainsi que celles formulées par les autres organismes consultés (Conseil supérieur de l'énergie, Comité d'experts pour la transition énergétique, Conseil national de la transition écologique), vont permettre d'établir une nouvelle version de la PPE qui sera mise à consultation du public dans les prochains jours, dernière étape avant l'adoption définitive de la PPE par décret ». Le ministère prend acte des précisions demandées par l'Autorité environnementale « concernant la présentation et la lisibilité du document par le public non-spécialiste ».Mais l'avis de l'Autorité environnementale soulève aussi des questions bien plus profondes.1/ Les scénarios à revoir. La programmation pluriannuelle de l'énergie s'appuie sur deux scénarios d'évolution de la consommation d'énergie. « Dont un ne permet pas d'atteindre les objectifs de la loi, alors que ceux-ci devraient s'imposer à la PPE », souligne l'Autorité environnementale. Sa recommandation résonne comme une évidence, elle préconise « de proposer des scénarios conformes à la loi de transition énergétique ». Ou sinon, de justifier pourquoi il ne le sont pas.2/ Le suivi à préparer. Le constat est cinglant : « La présentation d'un scénario dans lequel les objectifs de la loi ne seraient pas atteints et l'absence de vérification précise de l'adéquation entre actions prévues et objectifs poursuivis, nécessitent de prévoir des mesures supplémentaires à mettre en œuvre sans délai en cas de divergence par rapport aux objectifs », assène l'Autorité environnementale. Elle recommande de se préparer à actionner deux leviers « peu mobilisés » si la France ne suit pas la trajectoire prévue. L'Autorité environnementale appelle ainsi anticiper les marges de manœuvre sur la fiscalité de l'énergie. Et à mieux articuler la PPE avec l'action des collectivités territoriales.Elle recommande que le dispositif de suivi « permette de s'assurer régulièrement » de la cohérence d'ensemble de la PPE avec les documents locaux de planification (Sraddet et S3RENR). Et de « dresser une synthèse des leviers à disposition de toutes les autorités publiques (nationales, déconcentrées, décentralisées) en fonction de leurs compétences pour contribuer à l'atteinte des objectifs de la PPE, et de fournir des éléments de consolidation des apports territoriaux à l'objectif national ».3/ La présentation à éclaircir. L'Autorité environnementale recommande de rendre « plus accessible » les chiffres présentés, notamment en termes d'unités choisies, de comparaison à des ordres de grandeur connus et en les rapportant à une année de référence unique. Concernant l'évaluation environnementale, l'Autorité le déplore : « Deux évaluations distinctes sont proposées ». L'une concerne la PPE en général, l'autre porte sur le domaine de la mobilité. « Ce choix est source d'une inutile complexité. »Le périmètre considéré laisse aussi à désirer sur plusieurs points. Premièrement, sur l'articulation entre la France métropolitaine, la Corse et l'Outre-mer. Deuxièmement, sur l'évaluation des consommations d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre des biens importés. Troisièmement, sur la définition et l'exclusion des consommations dites « non-énergétiques ». Les volets relatifs aux impacts sur la biodiversité, l'utilisation et la pollution des sols, la ressource en eau et les déchets sont également à clarifier.4/ Une politique à préciser filière par filière. Concernant la production d'énergie, l'Autorité environnemale émet toute une série de recommandations. Pêle-mêle : expliquer quels dispositifs permettent de se diriger vers une sortir du charbon, indiquer les projets de développement du réseau de transport de gaz compatibles avec la diminution de la consommation inscrite dans la loi, compléter le volet nucléaire et notamment expliciter le calendrier de mise en service de l'EPR de Flamanville et du réacteur expérimental de quatrième génération Astrid.A propos des énergies renouvelables, l'Autorité appelle à mieux distinguer petite et grande hydroélectricitsé, de préciser le besoin en stations de pompage pour le stockage d'électricité, ou encore de justifier – au regard de considérations environnementales – les implantations choisis pour les éoliennes en mer. Pour les biocarburants, il faudrait proposer un bilan énergétique et environnemental de la production en France et justifier le choix de ne pas limiter la première génération plus fortement que la directive européenne.Thomas Blosseville