A l'origine, cette PPE devait servir de colonne vertébrale à la transition énergétique française. Après un débat national et l'adoption d'une loi, la PPE devait marquer l'aboutissement de la politique menée durant ce quinquennat en matière d'énergie. L'enjeu consistait à fixer des objectifs filière par filière aux horizons 2018 et 2023. Mais le gouvernement a finalement décidé de ne pas trancher sur le point le plus épineux, pourtant crucial pour assurer l'équilibre d'ensemble.Energies fossiles, nucléaire, renouvelables, maîtrise des consommations… L'évolution d'un mix énergétique est une équation à plusieurs inconnues. Les différents paramètres d'une transition sont interdépendants. Moins vous consommez d'énergie, moins vous avez besoin d'en produire… et plus le gâteau à se partager pour les différentes filières est petit. Les importations et les exportations entrent aussi en jeu et complexifient l'équation. C'est dire si le détail de la PPE était très attendu.Au final, la programmation prévoit des objectifs plutôt ambitieux pour le développement des énergies renouvelables. « Ce texte est un gage précieux de visibilité pour nos filières ; leur montée en puissance est désormais finement programmée », a réagi par communiqué le syndicat des énergies renouvelables (SER). Le syndicat voit dans la PPE un « signal de volontarisme très important donné aux investisseurs et aux industriels ». Dans le détail, filière par filière, les objectifs de développement des renouvelables sont fixés ici.La programmation pluriannuelle de l'énergie définit aussi des cibles en termes de réduction de la consommation d'énergie primaire fossile par rapport à 2012 : -8,4 % en 2018 et -15,8 % en 2023 pour le gaz naturel ; respectivement -15,6 % et -23,4 % pour le pétrole ; -27,6 % et -37 % pour le charbon. Pour ce dernier, la PPE précise : « Aucune nouvelle installation de production d'électricité à partir de charbon non équipée de système de captage, stockage ou valorisation du dioxyde de carbone (CO2) ne sera autorisée en métropole continentale ». Enfin, toutes énergies confondues, la PPE vise une baisse de la consommation finale de -7% en 2018 et -12,6% en 2023 par rapport à 2012.Reste le cas du nucléaire. C'était un point très sensible. D'une part, au vu de la prédominance de l'atome dans le mix électrique français et donc l'impact en terme social. D'autre part, à cause des difficultés techniques et financières auxquelles est aujourd'hui confrontée la filière. De nombreux réacteurs doivent en effet être arrêtés pour des contrôles dus à des craintes d'anomalies sérieuses. Mais surtout, la visibilité sur l'avenir du parc nucléaire doit valider la cohérence du futur mix énergétique et permettre d'atteindre les objectifs fixés, mi-2015, par la loi de transition énergétique. « Pour respecter la loi, la PPE devrait imposer la fermeture de 21 à 23 réacteurs d'ici à son échéance la plus lointaine, en 2023 », rappelle par communiqué Greenpeace. On en est loin.La PPE ne tranche rien sur l'avenir du nucléaire. Tout juste se borne-t-elle à rappeler l'objectif présidentiel de réduire la part du nucléaire de 75 % à 50 % dans le mix électrique. Pour le reste, elle renvoie vers EDF. Le texte impose à l'électricien d'établir « dans un délai maximal de six mois à compter de la publication du présent décret » une stratégie « compatible » avec les orientations de la PPE. Ce qui place la date butoir dans l'entre deux tours de la prochaine élection présidentielle.« Le gouvernement, en refusant de traiter la question de l'évolution du parc nucléaire vieillissant, met en péril le développement des énergies renouvelables et de l'efficacité énergétique », craint Anne Bringault, coordinatrice sur la transition énergétique pour le Cler et le Réseau action climat. Greenpeace va dans le même sens : « En programmant la fermeture de réacteurs, la PPE aurait pu donner une direction claire et définitive en faveur du développement des énergies renouvelables ». Pour l'OGN, avec cette PPE, « l’État et ses dirigeants se refusent à piloter la politique énergétique en France ». Cette critique n'est pas l'apanage des ONG écologistes. Le 26 octobre, les députés avaient déjà clamé leur déception vis-à-vis de la PPE. Y compris dans le camp de la majorité présidentielle : « L'expérience de la PPE n'est pas satisfaisante », avait reconnu le socialiste Jean-Paul Chanteguet.Thomas Blosseville