Créer une place de marché sur laquelle vendre et acheter des « économies de CO2 » : c’est le projet engagé par Bordeaux Euratlantique. Cet établissement public gère l’aménagement de 730 hectares sur les communes de Bordeaux, Bègles et Floirac, en Gironde. Les travaux concernent 2,5 millions de mètres carrés de logements, de bureaux et d’équipements publics. Un groupement d’entreprises, nommé Plateforme Noé, a été choisi en 2016 pour créer une plateforme de services. Depuis les terres excavées jusqu’aux déchets de construction, en passant par le transport du personnel, ce groupement est chargé de minimiser l’impact et les nuisances des chantiers. Il va notamment lancer une « monnaie climatique locale » pour compenser ses émissions de carbone.Comment ? Plateforme Noé s’est associé à Compte CO2, une société qui propose un système d’échanges de crédits carbone dans le cadre du mécanisme des projets domestiques de l’ONU. D’abord, en comptabilisant les baisses d’émissions de gaz à effet de serre des particuliers et entreprises volontaires. Ensuite, en vendant les crédits CO2 ainsi générés à des partenaires souhaitant compenser leurs émissions. Jusqu’à présent, en six ans, 15?000 ménages et plus d’une centaine d’entreprises ont contribué à ce dispositif en France. « Nous prenons simplement une commission au passage, présente Olivier Messager, cofondateur de Compte CO2. Cette fois-ci, à Bordeaux, notre solution sera pour la première fois utilisée sur le territoire d’une métropole. » En partenariat avec une entreprise du bâtiment, Eiffage, une entreprise du recyclage, Suez, et un aménageur public.À l’origine, Compte CO2 est parti d’un constat : les outils d’accompagnement à la transition climatique sont trop contraignants, ou supposent une capacité de financement. Plutôt que des investissements dans des travaux ou dans des équipements, l’entreprise a préféré récompenser les comportements sobres. « Notre système est robuste, car il s’appuie sur des preuves, défend le dirigeant. Comme des factures d’énergie ou des attestations de kilométrage automobile fournies lors des contrôles techniques. »À Bordeaux, l’idée à terme est de créer une dynamique territoriale où les économies de CO2 des uns seraient achetées par les autres. Pour l’instant, il s’agit de compenser une partie des émissions du projet d’aménagement. Aucun objectif n’a été fixé en quantité, mais les partenaires espèrent impliquer au moins 1?000 ménages et ensuite intégrer d’autres acteurs. « Ce sera une façon d’animer le plan climat air énergie du territoire. » Par exemple, avec l’opérateur et les usagers des transports collectifs. « Pourquoi demain ne pas payer ses voyages en tramway avec les crédits CO2 que l’on aura générés ? », imagine Olivier Messager.Thomas Blosseville