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MOBILITÉ

Zones à faibles émissions : il est nécessaire « d'intensifier et de concentrer » pour gagner en efficacité

PUBLIÉ LE 8 OCTOBRE 2021
ABDESSAMAD ATTIGUI
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Zones à faibles émissions : il est nécessaire « d'intensifier et de concentrer » pour gagner en efficacité
Le Grand Paris a décidé d’agir en 2015 en mettant en place la première zone à faibles émissions afin de réduire la pollution aux particules fines.Crédits : Adobe Stock
Les Zones à faibles émissions (ZFE) font partie des principales mesures de lutte contre la pollution atmosphérique dans les métropoles. Toutefois, une récente étude dévoilée par l’Institut Brunoy questionne leur efficacité.

Les zones à faibles émissions se basent sur des assomptions fausses ou obsolètes qui les rendent largement inefficaces ! Voici l’un des principaux postulats publiés dans l’étude « Sortir des ZFE pour mieux lutter contre la pollution » de l’institut Brunoy. Sous l’impulsion d’Anne Hidalgo, Paris a été la première ville française à installer en 2015 une Zone à faibles émissions pour lutter contre la pollution de l’air dont elle souffre. Le principe de cette mesure repose sur l’interdiction d’accès à une ville ou à une partie de ville pour les véhicules qui ne respectent pas les normes d’émissions des polluants atmosphériques, à savoir les particules et/ou les oxydes d’azote ou d’équipement (normes Euro) et/ou la présence d’un filtre à particules. 

Convaincue de son efficacité, la Loi Climat et résilience votée cet été 2021, généralise l’implantation de ces zones à toutes les villes françaises de plus de 150.000 habitants d’ici le 31 décembre 2024. Alors que celles-ci doivent contribuer à améliorer la qualité de l’air, l’étude souligne que leur extension encouragerait à l’achat de véhicules thermiques dont « il faudrait se débarrasser ».

Trois écueils de raisonnement

La démarche qui « pouvait sembler une bonne idée » serait freinée par trois erreurs fondamentales. Le premier biais concerne le «mythe du progrès », en effet ces zones reposent sur l’hypothèse qu’avec les normes Euro, les nouveaux véhicules deviendraient de moins en moins polluants. Mais cette supposition n’est « pas totalement vraie, notamment à cause des fraudes sur les Euro 5. Si nous comparons aujourd’hui des émissions réelles et les émissions en condition de test, nous obtenons en moyenne des émissions 7 fois plus élevées, c’est complètement déconnecté de la réalité ! », observe Olivier Blond, délégué spécial en charge de la qualité de l’air en Île-de-France et fondateur de l’Institut Brunoy.

À cela s’ajoute l’impasse sur la rupture technologique qui survient avec les voitures électriques (VE). Ce marché des VE qui a multiplié ses ventes par 3 pendant la crise sanitaire, représente désormais 15 % des nouvelles immatriculations. Cette révolution électrique « transforme radicalement la problématique : l’enjeu n’est pas de substituer une motorisation thermique par une autre, quelle qu’elle soit, mais de se débarrasser des motorisations thermiques dans leur ensemble. Et donc de passer à l’électrique », peut-on lire dans l’étude.

La troisième erreur dans cette stratégie est le ciblage. Ces zones s’attaquent aux véhicules les plus polluants classés en fonction de leur motorisation. « Mais c’est une erreur. Car les voitures thermiques qui polluent le plus sont surtout celles qui roulent le plus. Et pour simplifier, une voiture Euro1 qui roule 1000 kilomètres par an émet bien moins de pollution qu’une voiture Euro5 qui roule 250 kilomètres par jour ».

Un déficit d’acceptabilité

Les ZFE posent également un problème d’injustice sociale. Les inégalités face à la mobilité reposent sur des logiques de territoires : En Île-de-France, la Seine Saint-Denis compterait 70 % de véhicules de catégorie inférieure à Crit’Air2 (interdits pendant les pics de pollution et qui devront théoriquement être remplacés en 2024). Tandis que dans les Hauts-de-Seine, ces voitures ne représentent que 48 %.

Cette injustice provoque un « déficit majeur d’acceptabilité » auprès des populations qui possèdent des moyens modestes, et engendrerait par conséquent l’absence de verbalisation parce que « les collectivités ont largement renoncé à sanctionner les contrevenants ». Et pour cause ! sa mise en application pourrait créer un mouvement de contestation à l’image des gilets jaunes ou encore « l’épisode des bonnets rouges, qui s’étaient mobilisés contre l’écotaxe ».

Cela amène à l’enjeu des subventions et des coûts, et là encore le compte ne serait pas bon. Les ZFE coûteraient « très cher si on prend en compte les multiples aides à l’achat des véhicules qui sont systématiquement mises en place ». De plus, selon l’étude ce coût continuerait de grimper avec l’extension de ces zones aux Crit’air 3 en 2022 et Crit’Air2 en 2024. « Au total, respecter le calendrier de la ZFE reviendrait à remplacer en 3 ans presque 1,5 millions de véhicules. C’est totalement irréaliste », alerte l’étude.

« Quand à Paris on touche à 30 % voire 60 % du parc, nous ne pouvons pas espérer de le renouveler en six mois ou un an. Et comme ce système fonctionne sur une subvention à l’achat cela aurait un coût astronomique. Donc les communes concernées ne pourront pas pratiquement mettre en œuvre les prochaines étapes de la ZEF », commente Olivier Blond.

Les ZFE auraient donc selon cette analyse une existence presque « fantomatique », puisqu’« aucun politique n’ose mettre en œuvre cette mesure qui reste largement théorique ».

Des pistes d’amélioration

« Le problème est qu’on se focalise sur cette mesure qui détourne l’énergie d’autres manières de faire qui seraient plus efficaces ». Olivier Blond blâme notamment l’extension de la ZEF parisienne qui couvre 70 communes sur près de 400 kilomètres carrés. « Nous avons l’impression que plus la zone est grande, plus elle sera efficace. Mais c’est l’inverse qu’il faut faire ».

Il est même nécessaire « d’intensifier et de concentrer » la zone afin de gagner en efficacité : « Il faut se concentrer sur de petites zones, des centres-villes denses sur lesquelles nous pourrons avoir des exigences beaucoup plus fortes ». Ce dernier prend l’exemple de Madrid Central qui ne couvre que 4,72 km2 et dans laquelle sont acceptés que les véhicules électriques ou non-polluants. En concentrant ces zones dans les centres-villes, la mesure résoudrait en plus à l’injustice sociale décriée. « On touche en général des populations qui sont beaucoup plus riches dans les centres-villes qu’en périphérie. Ces habitants ont donc plus facilement les moyens de renouveler leurs voitures », ajoute-t-il.

La deuxième alternative à la ZFE proposée dans cette étude, est la Zero emitting urban fleet (ZEUF). Ce programme soutenu par le Forum économique mondial vise au remplacement des flottes urbaines professionnelles par des véhicules électriques... Des pistes de réflexion pour repenser le modèle économique et social des ZFE et gagner en efficacité sur le plan environnemental. 
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