Au premier abord, le chiffre paraît astronomique : 40 millions d'euros investis pour le traitement des déchets par le Sydeme, le syndicat d'une agglomération mosellane de 385 000 habitants. Un chiffre qui a fait bondir la Cour des comptes, dans son rapport sur la gestion des déchets ménagers et assimilés, rendu public en septembre 2011. Pourtant, à y regarder de plus près, c'est un projet global qui structure tout le territoire. Et économiquement équilibré.
Dès sa création en 1998, le syndicat mixte de transport et de traitement de Moselle-Est (Sydeme), qui couvre 291 communes, décide de placer la valorisation organique au centre de son dispositif de traitement des déchets ménagers, jusque-là enfouis. Une usine de méthanisation sera donc construite à Morsbach. Géré en régie, Methavalor tournera à pleine capacité à la fin de l'année.
Première étape de cette mutation : réinventer la collecte. Le Sydeme ramassait déjà en porte-à-porte deux flux, les OMR et les recyclables. « Ajouter les biodéchets impliquait de passer à trois flux et un surcoût de 20 % », précise Serge Winkelmuller. Le Sydeme choisit alors de simplifier l'opération, qui se fera simultanément pour les trois flux, une fois par semaine. Les habitants sont invités à mettre leurs déchets dans trois sacs de couleurs différentes : orange pour le tri sélectif, vert pour les déchets organiques et bleu pour les déchets résiduels. Ces sacs sont ensuite confiés aux bons soins du procédé de tri optique de Bagtronic dans trois centres de tri situés à Sarreguemines, Morsbach et Faulquemont. Bien perçue, la nouvelle organisation a amélioré le tri : + 25 % en poids pour les recyclables ! « En fait, nous avons amélioré le tri à coût constant », estime Serge Winkelmuller.
Quant aux biodéchets, ils sont méthanisés dans trois digesteurs de 15 000 t/an. Les 32 000 t/ande déchets organiques des ménages sont le gisement principal, complété par 5 000 tonnes de biodéchets de la restauration et des professionnels (grâce à une unité de déconditionnement) et 5 000 tonnes de déchets verts.
En sortie, aussi, tout a été optimisé. Le biogaz ? 5,5 millions de mètres cubes sont attendus. Trois utilisations sont prévues : la production d'électricité et de chaleur via la cogénération et l'injection dans le réseau de GRDF de 400 000 m3/ an. « L'avantage, c'est que nous n'avons pas besoin d'une installation de stockage du biogaz », souligne Serge Winkelmuller. Ce gaz alimentera (virtuellement) en GNV la flotte du Sydeme, mais aussi les particuliers. La cogénération produira 10 900 MWh électriques par an. La chaleur produite (12 400 MWh/an) sera réutilisée dans le process, pour chauffer les locaux de l'usine et du Sydeme, mais aussi des serres.
La méthanisation produit également des digestats, convertis en 9 000 t/an de compost à la norme NFU vendu aux agriculteurs, aux particuliers et aux collectivités. La fraction liquide (12 000 m3 riches en azote, phosphore, magnésium et potassium) trouvera son débouché comme engrais. « D'ici à un an, une ferme de 50 hectares l'utilisera pour cultiver entre 5 000 et 6 000 tonnes de plantes énergétiques, comme le miscanthus, qui alimenteront, en fonction de la saison, le procédé de méthanisation ou une chaufferie à biomasse », poursuit Serge Winkelmuller.
Au final, 80 000 t/an de déchets ultimes devraient rejoindre le centre d'enfouissement technique, au lieu de 120 000 t/an avant le début de la valorisation des déchets organiques. « Et le tout à coût constant pour le contribuable », précise Serge Winkelmuller. En effet, l'enfouissement était facturé 90 euros la tonne, pour 70 euros avec la méthanisation. « À terme, la facture de l'usager devrait même diminuer. »