En France, le parc des installations demeure très hétérogène. En témoignent les centres dédiés aux déchets ménagers, soit quelque 250 répartis sur le territoire, qui vont d'unités encore très peu mécanisées à des centres très performants, complètement automatisés, faisant appel à des techniques de pointe comme le tri optique. Minoritaires (un peu plus d'un quart du parc selon un état des lieux établi en 2011 pour le compte de l'Ademe, Eco-Emballages et Ecofolio), ceux-ci assurent une grande partie du tri : plus de 45 % des collectes selon la même étude… Par ailleurs, très peu de centres de tri des déchets ménagers et assimilés semblent, à ce jour, en capacité de répondre au grand défide l'extension des consignes de tri à tous les emballages plastiques. C'est la conclusion de l'expérimentation lancée au printemps 2012 par Eco-Emballages au sein de 51 collectivités et impliquant 32 sites. « On observe que cette extension n'est pas pérenne technique-ment dans les centres de tri exclusivement manuels, où une forte hausse des coûts a été enregistrée. Les résultats sont aussi médiocres dans les centres de tri fortement mécanisés contraints par l'espace. La meilleure cible serait donc les centres de tri automatisé qui disposent d'espace pour réaliser des aménagements », constate en guise de bilan Carlos de Los Llanos, le directeur du recyclage de l'éco-organisme. L'expérimentation ne concerne que trois centres sur les 32 : une réflexion est en cours sur un projet d'extension, reposant « sur la réunion de plusieurs conditions préalables et sur un calendrier progressif. »
Du côté des centres de tri des déchets industriels banals (DIB), qui traitent en général les déchets non dangereux des industriels ainsi que les encombrants des ménages, le parc, bien moins étoffé, est également très hétéroclite. Les tris manuel et semi-mécanisé l'emportent encore très largement, mais ces dernières années sont également sorties de terre quelques installations de pointe où les technologies les plus avancées ont trouvé leur place comme l'illustre le centre de tri haute performance (CTHP) Valazur de Veolia Propreté à Nice… Enfin, même les déchets de chantier ne sont plus en reste puisque émergent des installations de nouvelle génération. n
®®Quelques réalisations
l Le centre de Lingostière valorise les inertes… et bientôt le plâtre
En service depuis fin 2010, le centre de tri des déchets de chantier de Lingostière (Veolia), à Nice, tient ses promesses : « Il a atteint un taux de valorisation de 74,7 % en 2013, et de 78 % ces derniers mois ! », précise Stéphane Graille, le responsable du site. Le but de cette unité réalisée par Néos (capacité : 30 000 t/an) est de récupérer le plus possible les inertes pour les valoriser. « Si le procédé est simple, la com-binaison de différentes techniques déjà connues (cribles à doigts, séparateurs aérauliques, etc.) rend l'ensemble très performant », résume Stéphane Graille. Cinq fractions sont séparées. Celles supérieures à 80 mm sont réutilisables comme matériaux par les carriers, tandis que les fractions inférieures à 80 mm peuvent être, en partie, réemployées en remblai. Ce centre va franchir une étape supplémentaire avec l'arrivée imminente de deux machines de tri optique, des Mistral (technologie NIR) de Pellenc, dédiées à l'extraction fine du plâtre ! « Cet investissement est réalisé dans le cadre du programme européen Life + », précise Stéphane Graille. n
l Valazur valorise les déchets des entreprises et les encombrants
Dans les Alpes-Maritimes, le CTHP Valazur est « un outil fortement automatisé qui permet d'atteindre une valorisation de 70 % matière et énergétique », explique Jean-Charles Bérard, directeur d'exploitation. Démarré en juillet 2013, le centre est progressivement monté en puissance. « Depuis janvier 2014, il tourne à plein régime, en trois postes », précise-t-il. Réalisée par Néos (30 personnes à Beaune, en Bourgogne), cette unité d'une capacité de 120 000 t/an a nécessité un investissement de 18 M€. Ici, les déchets entrants – DIB et encombrant des ménages – sont déversés dans une fosse et soumis à un prétri. « Il s'agit de retirer les indésirables, les monstres en particulier, ces très grosses pièces qui ne pourront pas être broyées (…) Cette première étape est aussi l'occasion d'extraire les ferrailles qui elles sont valorisées », commente le directeur d'exploitation. Ensuite ? « Tout est envoyé dans un broyeur à crochets qui va réduire les déchets en fractions de 0-300 mm. » S'ensuit une première étape de criblage sur un crible à mailles 3D (du constructeur autrichien IFE) qui sépare les déchets en 0-150 mm et 150300 mm ; « la fraction supérieure à 300 mm revient vers le broyeur ». La fraction 0-150 est acheminée vers un second crible qui réalise trois coupes : 0-30 mm, 30-60 mm et 60150 mm. Celle inférieure à 30 mm, qui contient beaucoup d'inertes, est envoyée au centre de Lingostière, à proxi-mité. Les fractions restantes (30-60 mm, 60-150 mm et 150-300 mm) sont dirigées vers des séparateurs aérauliques (Néos) qui séparent les éléments lourds (le bois en particulier), des légers (plastiques, papiers et cartons…). « À l'issue de cette étape, on se retrouve donc avec six fractions ! » Les trois lourdes sont rassemblées : ce flux passe sous un overband (Lenoir) pour être déferraillé. Et s'achemine ensuite vers une machine optique du fabricant français Pellenc ST : une Mistral Wood qui trie, en positif, le bois et tous les déchets combustibles… De son côté, la fraction légère est dirigée vers deux machines ternaires Pellenc (des Mistral « clas-siques ») : « La première enlève le papier/carton et le PVC en positif, la seconde les films plastiques et ce qui reste de PVC. » Enfin, « tout ce qui reste à la fin de la ligne des légers et tout ce qui a été reconnu comme combustible sur la ligne des lourds est envoyé dans un granulateur Lindner pour être transformé en CSR destiné aux cimenteries », conclut Jean-Charles Bérard. n
l Au centre modernisé de Muy, Recyfilms a fait ses preuves
Le centre de tri de Muy (Var, capacité de traitement : 25 000 t/an) est parmi les centres retenus dans le cadre de l'expérimentation engagée en 2012 par Eco-Emballages. Ici, trois collectivités soit 70 000 habitants ont donc testé grandeur nature le tri élargi aux films, barquettes et autres pots de yaourts, avec des résultats très concluants, tant en matière de collecte que de séparation de ces nouvelles résines ! Muy a aussi démontré l'efficacité de son prototype industriel « Recyfilms ». Intégré au process, auquel il est relié via des convoyeurs, cet équipement – un ensemble constitué d'un petit crible balistique suivi d'une machine de tri optique – extrait automatiquement et directement l'essentiel des films plastiques, dès leur premier passage, afin qu'ils ne viennent pas perturber le bon fonctionnement du process. Concentrés en un point précis, ces films sont ensuite mis en balles et envoyés dans leur filière de valorisation. n
l À Athanor, Pizzorno fait progresser le tri des emballages et des OMR
Une transformation radicale ! Voilà ce qu'a vécu le centre de tri Athanor exploité depuis janvier 2013 par Pizzorno Environnement pour le compte de Grenoble Alpes Métropole. La société qui a remporté ce marché portant sur trois activités – le tri des déchets recyclables, celui des OM ainsi qu'une déchetterie – a investi 6 M€, essentiellement dans la modernisation du process de tri. Le chantier a été confié à l'ensemblier breton Ar Val, assisté du bureau d'études Girus.
Toute l'installation a été complètement repensée : « On a quasiment rasé l'intérieur de l'usine », explique David Valour, directeur adjoint valorisation France et Maroc chez Pizzorno, qui effectue la visite guidée en compagnie de Christian Desportes et de Julien Lassaut, respectivement directeur et directeur adjoint du site. « Le concept retenu est de prétrier une partie des OM pour la transformer en un flux qui ressemble à la collecte sélective », résume David Valour, précisant que ces deux flux – OMR et collecte sélective – ne sont jamais mélangés, le tri s'effectuant par campagne… En définitive, le process est… très complexe ! Mais l'installation tourne depuis quelques mois, et semble déjà porter ses fruits ! « Sur les 80 000 t par an d'OMR réceptionnées en entrée, nous pouvons sortir quelque 20 000 t de matières organiques, et produire un compost de qualité ». De ce gisement d'OMR entrant, seront également extraits, à l'aide de deux trieurs optiques de marque Titech (technologie NIR) ainsi que d'un séparateur à Courant de Foucault (Lenoir), 500 t de bouteilles et flaconnages plastiques ainsi que 3 000 à 4 000 t de papiers cartons, sans oublier 10 000 t d'acier et aluminium ! « Les papiers cartons restent en mélange, pour une qualité “gros de magasins” qui intéresse certains papetiers. »
Les résultats semblent satisfaisants également sur la ligne de tri dédiée aux collectes sélectives (30 000 t/an). Le taux de refus qui s'établissait à 52 % lors de la prise du marché, est très vite tombé à 3435 %, avec un objectif affiché de 25 %. Six trieurs optiques (des machines Titech, toujours) ont été installés sur la ligne (contre une seule Pellenc auparavant). Résultat ? « Une performance accrue mais aussi plus de confort – et moins de risque de TMS – pour les agents qui ont vu le nombre de leurs gestes quotidiens sensiblement diminuer ! », souligne Christian Desportes. Enfin, Athanor a profité du retour d'expérience de son centre de Muy pour mettre en place, ici aussi, son outil Recyfilms ! n