« Les monnaies complémentaires, aussi appelées monnaies citoyennes ou solidaires, existent depuis des dizaines d'années, un peu partout dans le monde », retrace Michel Mombrun, secrétaire national du Mouvement sol, une association pour la promotion de ces monnaies en France. Avec deux objectifs : maîtriser les échanges locaux et se réapproprier une unité de change. Et avec la crise économique, ces deux facteurs ont motivé citoyens et collectivités pour se lancer. « Il circule en France une cinquantaine de monnaies complémentaires… et au moins autant sont en projet », se réjouit Michel Mombrun.
Première condition de la réussite : « une monnaie ne peut être mise en circulation que par une initiative citoyenne, annonce-t-il. Il faut donc trouver un groupe qui se constitue en association et qui est déterminé à porter le projet. Puis il faut, si possible, l'appui des collectivités territoriales. » C'est d'ailleurs ainsi qu'est née à Toulouse, en 2011, la première monnaie complémentaire soutenue financièrement par une collectivité locale. « L'initiative a été lancée fin 2009 par un groupe de citoyens, qui a déposé un an plus tard, après avoir pris le temps de définir précisément sa démarche, une demande de subvention auprès de la ville de Toulouse, détaille Andrea Caro, coordinatrice du Sol-Violette . Et la ville a accordé 120 000 euros pour le lancement du projet ! » Le Sol-Violette concerne aujourd'hui 120 prestataires, 1 300 adhérents, un lycée et 4 maisons de chômeurs… Un beau succès donc, qui a notamment reposé sur un démarchage et une sensibilisation auprès du grand public et des prestataires. « La prospection auprès des entreprises et l'information des citoyens sont extrêmement importantes, énonce Étienne Roussel, chargé de mission économie sociale et solidaire au conseil général d'Ille-et-Vilaine. Il faut engager ces démarches au moins un an avant le lan cement de la monnaie, afin qu'elle intéresse ensuite le plus de monde possible. Car plus les participants sont nombreux, plus on peut aller loin ; mais sans adhérents, ce genre d'initiative meurt rapidement. » C'est d'ailleurs pour cette raison que le Galléco, monnaie solidaire en préparation en Ille-et-Vilaine, devait sortir en grande pompe le 21 septembre, accompagné d'une journée d'animations et de sensibilisation.
Autre point clé du montage du projet : l'élaboration de la charte d'adhésion. En effet, l'objectif de ces monnaies est de soutenir les échanges de proximité, avec des prestataires partageant les valeurs du développement durable. Pour le prouver, ils doivent répondre lors de leur adhésion à un questionnaire qui évalue par exemple le lien de l'entreprise avec son territoire, ses actions en faveur de l'environnement, sa gestion des ressources humaines, etc. « Les entreprises qui répondent à ces critères ont tout intérêt à s'engager dans la monnaie solidaire car elles sont alors référencées dans un catalogue remis aux utilisateurs de la monnaie et identifiées par un macaron sur leur vitrine, explique Étienne Roussel. Celles qui ne sont pas encore au point sont incitées à faire quelques efforts pour s'intégrer au réseau l'année suivante. » Une bonne façon de tirer l'économie locale vers le haut tout en mettant les citoyens au cœur du projet. l