À l'ouest, le vent du changement souffle fort en matière de communication ! Un changement initié essentiellement par les professionnels du secteur, désireux aujourd'hui de remettre un peu d'ordre dans leurs pratiques… et dans celles de leurs clients et prospects.
Une quarantaine d'agences et d'indépendants se sont ainsi regroupés depuis 2010 sous la bannière de l'Union des Conseils en Communication Ouest. Une structure toute récente, mais très active ! Dès fin 2012, l'UCC Ouest rendait ainsi publique sa « Charte de consultation des agences ». Un acte fort, qui traduisait bien le « ras-le-bol » de la profession face aux abus notoires de certains annonceurs.
« Cette initiative vise non pas à durcir le ton avec les annonceurs – car nous ne souhaitons pas un affrontement agences/annonceurs », explique Manuel Cornet président de l'UCC Ouest et directeur de l'agence NVOS (Nouvelle Vague Open source). « Mais elle cherche à favoriser une meilleure répartition du risque entre l'agence et l'annonceur. La mise en place de cette charte de consultation répond en effet à la démultiplication des appels d'offres ou consultations que l'on peut qualifier d'irresponsables. Le secteur a tout accepté pendant de nombreuses années. Nous sommes les premiers responsables de la dérive des pratiques, car nous avons nous-mêmes alimenté le système. Les agences ont été complices, souvent par peur de s'opposer à l'annonceur, peur de ne plus êtes consultées et de laisser le champ libre aux concurrents. Mais aujourd'hui, il faut arrêter le tout-gratuit, le self-service. »
Des agences en perte de rentabilité
Fortement impactées par la crise, les agences doivent en effet faire face à une forte perte de profitabilité qui les entraîne dans une course au chiffre d'affaires coûte que coûte. Alors que les consultations d'hier réunissaient 4 à 5 agences, celles d'aujourd'hui rassemblent désormais 10, 15, voire parfois une vingtaine d'agences. Des compétitions larges, dont les annonceurs attendent toujours plus : des stratégies déjà bien réfléchies et détaillées, des roughs quasi finalisés… et le tout présenté le plus souvent gratuitement.
« Ces dernières années, on a constaté un fort accroissement des pratiques abusives : des consultations sans suite, ou faussées, ou pléthoriques ! », souligne Manuel Cornet. « Des consultations au cours desquelles on a souvent du mal à entrer en contact avec les annonceurs -des rencontres pourtant importantes car elles permettent de mieux cerner contexte et objectifs de communication. Des consultations, enfin, pour lesquelles les perdants sont rarement indemnisés, alors qu'on leur en demande toujours plus au niveau des réponses à fournir. » Conséquence : l'inflation des moyens mis en œuvre dans les consultations finit par fragiliser la filière communication tout entière. Comme le prouve le seuil de rentabilité des agences de l'ouest, passé sous le seuil des 5 % depuis 2008, avec un minima à 2,4 % en 2009. « Certes, des règles ont été établies par l'AACC et l'UDA, mais elles sont restées lettres mortes. Les agences membres de l'UCC Ouest ont constaté que la non-application de ces règles a conduit progressivement le marché vers des pratiques qui contribuent à fragiliser toute une filière économique, comprenant les agences, les sous-traitants, les cabinets d'études, les graphistes et designers, les écoles, les instituts de formation et directement les emplois localisés dans nos territoires. On ne veut faire le procès de personne, car cette situation difficile est en partie le fait des agences qui ont accepté sans broncher la logique du toujours plus. Logique : quand on est isolé, on pense que les confrères ne sont pas concernés », reconnaît Manuel Cornet. « Mais pour notre survie, il est devenu vital d'agir. La création de l'UCC Ouest en 2010 a permis une prise de conscience collective. Aujourd'hui, nous pensons qu'il est temps de rappeler à la raison tous les acteurs de la communication. Pourquoi notre secteur échapperait-il à la logique de l'achat responsable et raisonné ? »
Prise de conscience collective
C'est dans ce contexte que la Charte de consultation des agences de l'UCC Ouest a vu le jour. Pensée collectivement par les 40 adhérents de l'UCC Ouest, elle a été élaborée en six mois par cinq de ses membres. Missionde ce document : défendre les bonnes pratiques auprès des annonceurs, lors des consultations publiques et privées et pérenniser les emplois de la filière, aujourd'hui véritablement menacés.
Un rappel à l'ordre généralisé, donc, qui marque la seconde étape du travail mené, par les agences membres de l'UCC Ouest, depuis la réalisation du «Guide Sélectionner son Agence Conseil».
Présentée sous la forme d'un document de deux pages, divisée en quatre parties et quatorze points, la Charte liste les différents éléments devant être respectés dans le cadre d'une consultation d'agences : qualité du brief, transparence, grille d'évaluation, délai de réponse, nombre d'agences interrogées, identité des agences, indemnisation des compétiteurs, respect des règles sur les droits d'auteurs, possibilité de rencontrer les décisionnaires, etc.
Un document clair et structuré, qui semble faire l'unanimité. « Cette initiative s'inscrit dans la volonté globale de l'UCC qui est de faire progresser la relation agences/annonceurs, dans l'intérêt de tous. La demande est d'ailleurs assez largement partagée par les donneurs d'ordre, qui nous apportent un soutien actif pour la mise en œuvre de cette charte. »
Publiée dans le dernier guide Com&Medias Ouest (qui couvre Bretagne et Pays de Loire) et en ligne sur le site de l'UCC Ouest, la Charte a été présentée durant le 1er trimestre 2013 à l'ensemble des entreprises et institutions de l'Ouest. « Les agences membres de l'Union se sont engagées à la transmettre à leurs clients et prospects », précise Manuel Cornet. « Des réunions ont également été organisées pour la faire connaître, au sein des CCI par exemple. Après une phase d'explication du principe et du contenu, nous sommes passés depuis le printemps 2013 à la mise en application : nos agences refusent désormais de participer aux compétitions qui ne respecteront pas les 14 bonnes pratiques de la Charte ! »
Reste à savoir si les bonnes intentions des uns et des autres ne seront pas balayées par les tensions du marché. À suivre…n