Il faut revoir les seuils d'exposition des perturbateurs endocriniens. C'est le principal enseignement des études menées à Verneuil-en-Halatte, dans l'Oise, par l'Ineris sur les effets de l'exposition au bisphénol-A (BPA), un perturbateur endocrinien ubiquitaire, dans des écosystèmes artificiels, les mésocosmes. « Nous disposons de 12 canaux de 20 m de long, 1 m de large et 30 à 70 cm de profondeur, permettant de tester trois conditions expérimentales différentes, pendant plusieurs mois », détaille Éric Thybaud, responsable du pôle Dangers et impact sur le vivant à la direction des risques chroniques de l'Ineris. L'institut a choisi de reconstituer un milieu typique de l'hémisphère nord : des sédiments, de la végétation, des invertébrés et, comme poissons, les épinoches à trois épines, une espèce très courante, dont les deux sexes sont affectés par le BPA. Les concentrations choisies sont de 1, 10 et 100 µg/l. À la concentration la plus faible, les chercheurs ont observé une atrophie de gonades femelles, sur les mâles à partir de 10 µg/l. A 100 µg/l la structure des populations est modifiée : les épinoches adultes sont plus nombreux, les juvéniles sont plus grands, et la répartition des espèces d'invertébrés est modifiée. Par ailleurs, la croissance de la végétation (du cresson notamment) est affectée négativement, sans que les mécanismes entre tous ces effets ne soient clarifiés. « En conclusion, nous avons observé des effets physiologiques à partir de 5,6 µg/l en mesuré, alors que la concentration nominale sans effet observé est établie à 16 µg/l. Nous pensions montrer que les effets en mésocosmes seraient moins impactantes sur les espèces qu'en laboratoire. En fait, c'est l'inverse », conclut Éric Thybaud.