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Des solutions promet teuses qui doivent faire leurs preuves

LA RÉDACTION, LE 1er AVRIL 2010
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La programmation pluriannuelle des investissements de production d'électricité pour la France prévoit d'arriver à quelque 1 000 mégawatts (MW) produits à partir de l'énergie éolienne en mer et des autres énergies marines d'ici à fin 2012 et 6 000 MW d'ici à fin 2020. Les énergies marines liées à l'eau doivent encore franchir de nombreux obstacles techniques avant de s'imposer comme une source d'énergie crédible. D'après un scénario de l'Ifremer, elles pourraient fournir 2,2 % des 20 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) d'énergies renouvelables supplémentaires à produire d'ici à 2020, ce qui correspond à l'objectif européen commun. Un de leurs avantages : la régularité de leur production. DES OBSTACLES DE TAILLE Le milieu maritime est très hostile. Il est corrosif ; il impose un travail sous-marin, assez vite très profond pour implanter et maintenir les appareils ; il peut être dangereux pour les matériels, menacés par les déchets flottants, les tempêtes ou la pollution. « Il convient, sur ces projets sophistiqués, d'innover à partir de solutions éprouvées », note Nicolas Teisseire, chef de projet au Pôle Mer Bretagne. L'un des systèmes de récupération d'énergie marine le plus connu, le Pelamis, est un houlomoteur : il fonctionne grâce à l'énergie des vagues. Il comprend plusieurs caissons cylindriques articulés et reliés entre eux ; lors du passage d'une vague, le mouvement d'un caisson par rapport à l'autre actionne un bélier hydraulique, qui fait tourner un moteur. Sa notoriété vient de l'installation en 2008 de trois de ces appareils, d'une puissance unitaire de 750 kW, dans une ferme prototype au large du Portugal. Mais aussi du retentissement qu'a eu le retrait, quelques mois plus tard, des appareils qui subissaient des fuites et des problèmes de flottabilité. La plupart des concurrents du Pelamis avouent qu'ils ne sont pas surpris par ce contretemps, même s'ils le regrettent parce qu'il freine le développement du secteur, « déjà très tendu économiquement, car il ne présente pas la même valeur ajoutée que celui des énergies fossiles », selon Michel Paillard, chercheur à l'Ifremer. « Nos nombreuses années d'expérience de la mer nous incitent à la prudence. La mer est un milieu extrêmement complexe », remarque Frédéric Le Lidec, directeur de l'Incubateur sur les énergies marines que le groupe français DCNS vient de créer à Brest. Spécialisé dans le secteur naval de défense depuis 400 ans, le groupe dispose de nombreux atouts, comme ses deux centres de recherche qui travaillent sur la résistance des matériaux et des machines tournantes en milieu marin. Il développe par exemple un houlomoteur sous licence, sur la base de la technologie Ceto, pour EDF Énergies Nouvelles. Un ballon flottant à fleur d'eau, relié par une tige à une pompe hydraulique située sur le fond marin, est mis en mouvement par les vagues. La pompe ramène de l'eau sous pression à terre, où elle est turbinée. En cas de tempête, « seul le ballon risque d'être perdu, et non tout l'investissement », avance Frédéric Le Lidec. Un prototype à l'échelle 1 sera mis à l'eau début 2011 à La Réunion. OPTIMISER LA MAINTENANCE L'installation à terre des équipements les plus sensibles est aussi l'une des options prises dans le cadre du projet Oyster de l'entreprise écossaise Aquamarine Power. Cet appareil ressemble à une huître géante : une « coquille » est posée au fond de la mer, à une profondeur d'environ dix mètres ; l'autre bouge d'avant en arrière au gré des vagues, actionnant un système hydraulique qui pompe l'eau jusqu'à terre. Cela permet d'effectuer la maintenance des appareils électriques à terre ; l'entretien des « huîtres » elles-mêmes ne nécessite pas d'intervenir à une grande profondeur. Minimiser les coûts de maintenance est une des clés du succès commercial futur des technologies. Les houlomoteurs ne sont donc évidemment pas les seuls à s'en préoccuper. Ainsi, le dispositif de récupération de l'énergie des courants Seagen, fabriqué par Marine Current Turbines, est composé de deux hélices arrimées sur des mâts horizontaux, de chaque côté d'un mât vertical planté au fond de la mer. Ce mât central, qui sort à une dizaine de mètres au-dessus des flots, sert à remonter les hélices, facilitant leur maintenance à partir de la plate-forme émergée. UN GAGE DE LONGÉVITÉ Le Searev développé par l'École centrale de Nantes (ECN), qui se présente extérieurement comme un gros caisson fermé, ne comprend aucune partie « noble » (électrique, mécanique) ni aucune charnière, pivot ou axe, en contact direct avec la mer. Le mécanisme, une roue pendulaire qui se balance au rythme de la houle et transforme ce mouvement en pression, se trouve intégralement dans la coque. D'après Alain Clément, chercheur au Laboratoire de mécanique des fluides de l'ECN, cette étanchéité assurera sa longévité dans l'eau de mer. En outre, « la roue peut faire un tour complet dans la coque : il n'y a pas de butée mécanique, ce qui offre une meilleure résistance aux tempêtes ». Enfin, certains font le choix de renoncer totalement aux matériaux les plus sensibles à la corrosion : l'Anaconda de Checkmate Seaenergy, encore au stade expérimental, est un long tube en caoutchouc. Plein d'eau de mer, il est équipé d'une tête semi-sphérique qui fait face aux vagues et d'un train qui contient une turbine. Lorsqu'une vague arrive, elle provoque une ondulation du tube qui circule jusqu'au train et actionne la turbine. « Les tubes en caoutchouc peuvent vivre une éternité dans la mer. L'Anaconda ne casse pas, ne contient ni charnières ni joints... et il est peu coûteux », revendiquent ses concepteurs. TOUJOURS À L'ABRI DES TEMPÊTES Les solutions profondément immergées, de leur côté, offrent une bonne résistance aux tempêtes. Ainsi, l'hydrolienne Open-Center (à centre ouvert) de la société irlandaise Open Hydro comporte une turbine fixée sur un tripode, lui-même posé sur le sous-sol. Elle ne nécessite pas d'ancrage, ce qui minimise les coûts d'installation, et peut fonctionner dans les deux sens pour exploiter les marées montante et descendante. « À 35 mètres de fond, la sensibilité des équipements aux événements climatiques extrêmes est moindre, » explique Cyrille Abonnel, chargé de mission à la division production et ingénierie hydraulique d'EDF. Le groupe français a sélectionné cette technologie pour équiper son futur parc de production d'électricité à partir des courants marins, en face de Paimpol-Bréhat (Côtes-d'Armor). Autre argument essentiel d'Open Hydro : l'hydrolienne ne comporte aucune partie émergée. « Les échanges avec les parties prenantes, élus, pêcheurs, associations de défense de l'environnement, ont fait apparaître un consensus pour la sélection d'une technologie complètement immergée. Les autres usages de la mer ne sont ainsi pas affectés », poursuit Cyrille Abonnel. La maturité préindustrielle de la solution Open Hydro, à l'heure où le groupe français a pris sa décision, a aussi été importante. Les technologies d'énergies marines renouvelables étant très jeunes et les prototypes coûteux à réaliser, certaines entreprises n'ont encore réalisé qu'un prototype à échelle réduite, qu'elles ont généralement fait fonctionner en bassin à houle ou à courants ; d'autres ont testé ce prototype en mer ; quelques-unes ont éprouvé un prototype à l'échelle 1 ; et enfin, rares sont les fabricants qui ont pu aller jusqu'à implanter plusieurs appareils en réseau. PREMIÈRES FERMES EN 2011 En France, le parc de quatre hydroliennes qui doit être installé à Paimpol-Bréhat à partir de 2011, pour une connexion en 2012 au réseau électrique national, présentera la particularité d'être... un parc ! « Jusqu'à présent, les opérations de test des systèmes de récupération des courants marins concernaient un seul appareil à la fois. Là, nous pourrons étudier les effets de sillage provoqués par les hydroliennes. Nous pourrons aussi nous pencher sur la conversion et l'évacuation de l'énergie fournie par plusieurs appareils. Nous aurons notamment, c'est une première mondiale, un poste de conversion sous-marin », se réjouit Cyrille Abonnel. Ce poste, situé au centre du quadrilatère formé par les hydroliennes, effectuera la conversion du courant alternatif en courant continu, beaucoup plus facile à transporter sans pertes d'énergie. De son côté, Marine Current Turbines (MCT) annonçait en février 2010 que Seagen était « le premier et unique système de récupération de l'énergie des courants marins à avoir dépassé 1 000 heures de fonctionnement » en mer. D'une puissance de 1,2 MW, ce prototype commercial affiche des résultats encourageants : depuis sa mise en route, il a fourni 800 mégawatts/heure (MWh) au réseau électrique irlandais, avec un facteur de charge de 66 %. En décembre 2009, l'entreprise pouvait se réjouir d'avoir levé 3,9 millions d'euros pour construire une première ferme commerciale d'hydroliennes au large du Royaume-Uni, un projet qu'il compte mener à bien dans les deux années à venir. UNE ÉNERGIE BIENTÔT MATURE En Corée du Sud, un programme a été lancé en mars 2008 pour créer une ferme hydrolienne contenant 300 turbines d'une puissance unitaire de 1 MW. Des analyses environnementales sont en cours pour étudier l'effet sur les milieux des turbines sélectionnées, du constructeur anglais Lunar Energy. La mise en route est projetée en décembre 2015. Si le secteur de l'énergie des courants est plus mature, celui de l'énergie de la houle le suit de près : vingt-cinq Pelamis P2 de seconde génération doivent en effet être installés au large de l'Écosse d'ici à 2014, dans le cadre du projet houlomoteur Aegir, le plus important d'Europe. Celui-ci doit atteindre une puissance de 200 MW. Le « serpent de mer » n'a donc pas dit son dernier mot. Au-delà de ces technologies déjà presque industrielles, de nouveaux concepts voient le jour très régulièrement, surprenant par leur inventivité. Ils concernent parfois les mêmes sources d'énergie. UN CERF-VOLANT AU FOND DE LA MER Minesto, entreprise issue du groupe Saab par essaimage, propose d'utiliser un cerf-volant sous-marin baptisé Deep Green pour capter l'énergie des courants. Maintenu au bout d'une longe arrimée à 60-150 mètres au fond de la mer, il est entraîné par le courant et suit une trajectoire contrôlée - en huit sur les démonstrateurs. La vitesse acquise en tournant s'ajoute à celle des courants, multipliant selon ses concepteurs d'un facteur dix la puissance du flux d'eau qui entre dans la turbine, accrochée sous l'aile du cerf-volant. Une rentabilité énergétique qui pourrait être prometteuse. Les projets concernent également deux autres sources d'énergie : l'énergie thermique des mers et l'énergie osmotique. DCNS travaille, en partenariat avec Total et l'Ifremer, à mettre au point une centrale électrique utilisant l'énergie thermique contenue dans les eaux tropicales de l'île de la Réunion. La centrale jouera sur la différence de température entre l'eau qui se trouve à environ 1 000 mètres de profondeur et l'eau de la surface pour produire de l'électricité. « L'écart de température est très faible, de l'ordre de 20 °C. Nous devons donc optimiser la récupération énergétique. Entre nos premiers travaux en 2008 et aujourd'hui, nous avons déjà gagné 50 % de production d'énergie sur cette technologie », explique Frédéric Le Lidec. Un prototype sera installé à terre en 2011 pour effectuer ces travaux. Autre priorité : tester les tuyaux, qui feront 5 mètres de diamètre et 1 000 mètres de long et devront subir une pression très importante. Un démonstrateur doit être installé en Méditerranée dans les mois qui viennent. Dernier point à creuser : la sélection des meilleurs sites pour installer la centrale, dans une région où les cyclones sont récurrents. Une centrale pilote d'une dizaine de mégawatts devrait voir le jour en 2014. En raison de son inertie thermique, l'eau venant des profondeurs peut aussi servir à refroidir les bâtiments en été, grâce à un échangeur thermique. Cette technologie est parfois appelée Swac, de l'anglais Sea Water Air Conditionning. La société française De Profundis a sorti un Swac « deuxième génération ». En pulsant l'eau au lieu de l'aspirer et en la faisant circuler en boucle fermée, DeProfundis dépasse les phénomènes de cavitation et évite d'avoir à installer des pompes immergées en grande profondeur. Le liquide caloporteur circule dans un échangeur thermique immergé au fond de l'eau. Une fois refroidie par le milieu ambiant (4 à 5 °C), l'eau remonte jusqu'au circuit de climatisation pour rafraîchir l'air. Le système fonctionne dans les lacs à partir de 35 mètres de profondeur et dans l'océan à partir de 800 mètres. En septembre 2009, un prototype a été immergé à la Capitainerie du Bourget-du-Lac en Savoie. En 2010, l'entreprise envisage de commercialiser sa solution lacustre et de tester son système en mer. EXPLOITER LES ESTUAIRES Dans les estuaires, la présence d'eau douce et d'eau salée permet de faire jouer le phénomène d'osmose. Lorsque deux réservoirs contenant l'un de l'eau salée, l'autre de l'eau douce sont séparés par une membrane perméable à la seule eau douce, cette dernière tend à migrer vers l'eau salée. La pression dans le réservoir d'eau salée augmente et peut être récupérée. L'industriel le plus avancé sur cette technologie, le groupe norvégien Statkraft, a inauguré en novembre 2009 un premier prototype mondial, d'une puissance de 4 kW. Un rapport de 2008 de l'Ifremer jugeait cette forme d'énergie peu adaptée au contexte français, du moins à moyen terme, en raison notamment de la difficulté à trouver « des zones d'implantation possible si l'on cherche à réduire les risques de conflits ». La « difficulté à mettre au point une membrane semi-perméable performante » était aussi soulignée. Emmanuel Soetaert, président de la filiale française de Statkraft, note qu'un autre point essentiel est d'améliorer le système de filtration de l'eau douce en amont des membranes : « Nous savons que l'efficacité des composants augmente rapidement avec le temps, et nous y comptons. » En revanche, l'installation ne produit pas de nuisances et pourrait, selon lui, être implantée en milieu urbain. Malgré l'aspect peu mature de certaines technologies, comme le souligne Alain Clément, « dans l'état actuel des choses, il faut développer tous les secteurs jusqu'à leur maturité industrielle : c'est un piège de parler dès maintenant de rentabilité financière des projets, car certaines technologies risquent d'être tuées dans l'oeuf ». Il est aussi dangereux de trop se fier au potentiel « de l'énergie des courants » ou « de l'énergie des vagues », qui restent des notions théoriques. « Tant qu'un prototype n'a pas été construit à l'échelle 1, il n'est pas possible de tirer de conclusions », soutient Frédéric Le Lidec. Au-delà des déclarations enthousiastes, une chose est sûre : dans ce marché concurrentiel qui ne sera pas français mais mondial, la course est engagée pour asseoir les technologies de demain.


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