Les 3,4 millions de téléspectateurs qui ont regardé le documentaire diffusé lundi 17 mai sur France 3 ont dû penser, comme le titre l'indiquait, qu'il y a « du poison dans l'eau du robinet ». Comme bien souvent, ce type de film s'appuie sur le ressort de la peur pour intéresser le public à une problématique environnementale. Au final, le téléspectateur en ressort sonné, angoissé, et n'a plus qu'à aller au supermarché faire le plein de bouteilles d'eau.
Sur la forme, ce documentaire dérange. Bien souvent, la réalisatrice semble faire la preuve de ce qu'elle avance lorqu'elle montre ses interlocuteurs déstabilisés, alors qu'elle n'a pas toujours raison. Armée d'une valise multimédia équipée d'une caméra cachée, elle se met en scène dans un étrange ballet de caméras et d'attachées de presse. Pourquoi diable en faire autant, alors que les informations sont disponibles et que les acteurs publics et privés sont prêts à en parler, comme en témoignent les articles de la presse professionnelle et les multiples colloques organisés sur le thème de l'eau.
Sur le fond, quatre types de pollutions sont abordés avec une même importance : certaines biens réelles, comme les nitrates et les pesticides ; d'autres moins connues (le radon) ou non avérées (l'aluminium et son lien avec la maladie d'Alzheimer). Il est dommage que, dans le souci d'informer le public sur sa santé, la réalisatrice n'ait pas rappelé que, pour les nitrates, les pesticides et l'aluminium, le risque est beaucoup plus lié à l'alimentation qu'à l'eau du robinet. Quant aux résidus médicamenteux, ils menacent le milieu naturel - ce qui est bien montré dans le film - mais beaucoup moins le consommateur d'eau, leur présence supposée dans l'eau du robinet étant à dose homéopathique.
Le mérite de ce documentaire est sans doute de pointer la nécessité de mieux informer les consommateurs sur la qualité de leur eau : affichage municipal, lisibilité des informations des ARS (anciennement les Ddass). Il montre aussi les problèmes liés à une responsabilité éclatée entre les intervenants publics (collectivités, ARS, préfecture, Afssa, Afset, etc.), le manque d'équité entre les grandes villes et les communes rurales (manque de financements, impact des zones de cultures intensives, etc.). Mais ce film a fait plus de mal que de bien, et la confiance des consommateurs risque d'être difficile à récupérer.