Les micropolluants présents dans les milieux aquatiques proviennent en grande majorité des eaux usées domestiques. Une priorité est donc de les éliminer dans les stations d'épuration, mais les milieux ont aussi une capacité d'épuration naturelle.
À Berlin, l'alimentation en eau potable se fait grâce à quelque 700 forages implantés le long des berges de deux rivières (la Havel et la Spree). L'eau ainsi pompée dans les aquifères provient en partie de ces cours d'eau, en partie des précipitations, et enfin (jusqu'à 30 % du total) des eaux usées, traitées et rejetées dans le milieu naturel. La filtration naturelle par les berges est donc un phénomène essentiel du cycle berlinois de traitement de l'eau potable : elle participe à la purification de l'eau pompée.
ÉQUIPEMENTS DE SIMULATION
Afin d'optimiser ce cycle urbain de l'eau, le Centre européen de simulation des rivières et des lacs de l'Agence fédérale allemande de l'environnement dispose d'équipements permettant d'« évaluer ce que le milieu naturel est prêt à supporter, et ce qu'il est capable de traiter lui-même : cela doit permettre de jauger ce qui doit être prétraité dans les stations d'épuration pour que le milieu naturel puisse finir le travail », explique Michel Dutang, directeur de la recherche de Veolia Environnement.
Les installations de ce centre européen comprennent notamment une rivière artificielle de 800 mètres de long et plusieurs aquifères artificiels, qui rendent possibles des expérimentations toxicologiques et des études sur le devenir des polluants qu'il serait impossible de mener directement dans le milieu. Des études sur le terrain donnent quant à elles une idée plus précise des phénomènes à l'oeuvre localement.
CONDITIONS REDOX
Dans le cadre du projet Nasri (2002-2005), des équipes berlinoises ont ainsi étudié le devenir de 38 micropolluants organiques au cours de leur passage au travers des berges sablonneuses, puis dans les aquifères des lacs Tegel et Wannsee. Au cours de ce transfert, les phénomènes d'élimination des micropolluants sont complexes : filtration, minéralisation ou transformation par biodégradation, inactivation, adsorption, précipitation ou tout simplement dilution.
Le programme a permis de mesurer la concentration des micropolluants dans différentes zones redox. Au plus haut de la nappe, se trouvent les zones oxygénées, plus profondément viennent les zones anoxiques (absence d'oxygène dissout). « Certains micropolluants sont mieux éliminés dans les zones oxygénées comme la plupart des antibiotiques, d'autres en zone anoxique comme la carbamazépine, un antiépileptique. D'autres se sont révélés persistants quelles que soient les conditions, avec moins de 30 % de réduction de leur concentration au cours du passage dans les nappes, comme le MTBE (additif des carburants) ou la primidone (antiépileptique) », détaille Gesche Gruetzmacher, chercheur au Centre de compétences des eaux de Berlin. À partir de ces résultats, il devient plus efficace de déterminer les traitements complémentaires à apporter pour traiter l'eau - sachant qu'à Berlin, en raison de la qualité des eaux de surface, de la filtration naturelle et de la filtration dans les usines de potabilisation, la concentration en micropolluants de l'eau potable est largement inférieure aux valeurs cibles réglementaires.