Le 7 janvier 2009 : un nouveau record de consommation d'électricité est battu, avec 92 400 mégawatts appelés. Les pics de consommation lors des périodes de grand froid sont de plus en plus intenses, et croissent plus vite que la consommation électrique (40 % contre 16 % depuis 1996). La situation devrait empirer avec le développement du chauffage électrique (70 % des logements neufs en sont équipés) et des pompes à chaleur. Réseau de transport d'électricité (RTE) prévoit des pics à 104 000 MW en 2015, et à 108 000 MW en 2020. Or ces pointes ont un impact environnemental, puisqu'elles impliquent la mise en route de centrales à gaz et à charbon, voire au fioul dans le cas des pointes extrêmes.
Selon les gestionnaires des réseaux électriques, les énergies renouvelables intermittentes n'aggravent pas les pointes. « La production éolienne est souvent significative pendant les vagues de froid, indique Hervé Mignon, directeur du département développement du réseau et perspectives énergétiques de RTE. En janvier 2010, une période de grand froid, donc de grande consommation électrique, la production éolienne a été souvent forte, jusqu'à 2 500 MW. Elle a contribué à l'équilibre entre l'offre et la demande. » La présence de trois régimes de vent indépendants, en mer du Nord, dans le Rhône et en Atlantique, permet d'avoir toujours une production éolienne à condition de bien répartir les aérogénérateurs. Néanmoins, la variabilité est forte. Le facteur de charge (le rapport entre l'électricité produite et la capacité installée) reste fluctuant. En janvier 2010, il était en moyenne de 24 %, mais a varié entre 4 et 60 %.
Pour limiter les pointes, la première chose à faire est d'informer les consommateurs d'électricité, surtout dans les régions vulnérables comme la Bretagne. RTE a ainsi lancé l'opération Ecowatt depuis l'hiver 2008-2009, afin de sensibiliser les personnes aux risques de coupures, et les encourager à modérer leur consommation électrique entre 17 et 20 heures. 18 500 personnes se sont inscrites et reçoivent les alertes par SMS, « un succès » selon RTE.Dans leur rapport sur la gestion de la pointe électrique remis à Jean-Louis Borloo le 1er avril dernier, le député Serge Poignant et le sénateur Bruno Sido insistent sur la nécessité d'investir dans les moyens de production de pointe, mais surtout dans les moyens d'« effacement » de la consommation. Contrairement au délestage qui est à l'initiative du gestionnaire de réseau, l'effacement consiste à diminuer la demande avec l'accord du consommateur.
La société Voltalis propose l'installation gratuite chez les particuliers ou les entreprises qui le souhaitent d'un boîtier permettant d'arrêter temporairement certains appareils électriques (essentiellement les radiateurs et les chauffe-eau) sans gêner les occupants. Voltalis vend cette « non-consommation » à RTE : lorsque cela coûte moins cher que la mise en route de nouvelles capacités de production, RTE fait appel préférentiellement à ce service. « Ce choix est purement économique, pas écologique », souligne Pierre Bivas, P-DG de Voltalis, même si l'effacement est bien sûr plus « vert » que la mise en route de centrales thermiques. Du côté des consommateurs, l'intérêt est de réduire la facture, « entre 7 et 12 % », assure Pierre Bivas. On aurait pu penser que la consommation était simplement différée, mais nous avons constaté que plus des trois quarts ne sont en fait jamais consommés. » Fin 2009, environ 10 000 boîtiers avaient été installés, et Voltalis enregistrait 20 000 demandes supplémentaires. « Trois millions de foyers équipés d'ici trois ans, ce serait la puissance de quatre EPR ou de dix tranches de centrales au fioul comme celle de Porcheville, dans les Yvelines », sourit Pierre Bivas. EDF tente de rattraper son retard en la matière, et a expérimenté cet hiver, via sa filiale Edelia, un projet de pilotage à distance de certains équipements domestiques et de suivi par Internet des consommations journalières de 600 foyers bretons.
Un autre moyen de lisser les pointes est de stocker l'électricité aux moments où la production dépasse la consommation, pour utiliser ce surplus au moment des pics. EDF et l'Ademe travaillent sur un projet de recherche (lire encadré ci-dessus). Mais le principe est déjà mis en oeuvre avec le « pompage-turbinage », en faisant remonter de l'eau d'un bassin bas vers un bassin haut en période de faible consommation, une eau qui est alors disponible pour la production hydroélectrique. Ce système offre les meilleurs rendements de stockage (autour de 85 %) et peut emmagasiner de grandes quantités d'énergie. Mais il nécessite de créer des retenues assez vastes dans des zones de relief, et donc de considérer les impacts environnementaux...