L'impression sur films plastiques, qui concerne 38 à 40 % du marché des plastiques, doit faire face à un défi de taille : transférer l'encre sur la surface et l'étaler sans qu'elle s'efface au toucher (propriété dite de mouillabilité). Pour les films en polyéthylène, actuellement, le plus simple est d'incorporer des solvants organiques dans les encres et de traiter la surface du film par effet corona dans l'air. Mais cette technique n'est pas aussi efficace quand les films ne sont pas en polyéthylène (polyester, polyamide...). L'astuce consiste alors à déposer, en précouche entre l'encre et le plastique, une solution contenant des molécules ayant à la fois des fonctions lipophile (pour le plastique) et hydrophile (pour les encres). Problème : cette technique est grande consommatrice de solvants, et donc fortement émettrice de COV. En flexographie et en héliogravure, c'est en centaines, voire en milliers de tonnes par an qu'il faut compter les rejets de COV sur chaque site de fabrication. Or le couperet réglementaire sur leur traitement est tombé cet automne : il interdit de fonctionner sans diminuer les rejets de COV. En développant une solution zéro émission, c'est donc un véritable saut technologique qu'Air liquide propose aux entreprises de l'impression sur films.
Traitement de surface
au plasma
Le principe consiste à utiliser un plasma gazeux à base d'azote à pression atmosphérique, capable de reproduire à la surface du film la même chimie d'accrochage eau/huile que par l'intermédiaire d'une précouche. Avec une machine de même taille qu'une station de traitement Corona, ce procédé s'affranchit de la mouillabilité du plastique, quelle que soit sa molécule de base (PE, PP, polyester, polyamide). Mais, surtout, il ouvre la porte aux encres respectueuses de l'environnement. Car, jusqu'à présent, les professionnels ayant choisi des encres aqueuses ou photopolymérisables devaient, même pour le polyéthylène, d'utiliser une précouche d'adhérence en phase solvant. Le bilan global était donc insatisfaisant. Le nouveau traitement de surface par plasma permet, a contrario, de les utiliser. Cependant, pour les encres à l'eau, la combinaison n'est pas encore optimale, car la qualité s'avère toujours moins bonne et le procédé requiert plus d'énergie pour le séchage, faisant perdre en productivité sur la chaîne d'impression. En revanche, les encres dites photopolymérisables s'y prêtent parfaitement. « Ce sont des liquides sans solvant, constitués de prépolymères de faible poids moléculaire et de monomères liquides, qui baissent la viscosité. Sous l'effet des ultraviolets, ils polymérisent et durcissent », explique Panayotis Cocolios, l'expert spécialiste du sujet chez Air liquide.
Avec cette technologie de rupture, le spécialiste des gaz industriels et médicaux offre donc une possibilité de travailler n'importe quel film polymère, totalement sans COV et avec une consommation énergétique minime, équivalente au traitement corona appliqué au polyéthylène. « Nous comptons quantifier rapidement tout cela pour fournir l'empreinte carbone du procédé », explique-t-on chez Air liquide. Des références ont déjà été enregistrées en Allemagne l'an dernier, une autre en France plus récemment, et de nombreux contrats sont sur le point de se conclure. Le marché est en effet immense, couvrant à la fois l'alimentaire (75 % des films utilisés), l'emballage souple pour détergents et produits de toilette, les imprimés et sacs souples, les sacs de conditionnement spéciaux de type engrais, etc. On notera également des débouchés dans l'industrie des multicouches, dont le souci est de garantir la cohésion entre les différents films et matériaux utilisés, typiquement comme un paquet de café.