Quelle métamorphose est en cours depuis dix ans ?
L'expression espaces verts a longtemps traîné une connotation d'espace non urbanisé, de délaissé de l'aménagement. En réinterrogeant la place de la nature en ville et en replaçant l'homme au cœur de cet écosystème et des services qu'il peut lui apporter, le revirement est complet. L'approche était purement technique, le vivant désormais prime. Les pratiques changent : fini l'obsession du « faire propre », du bien aligné, l'horreur du vide et la tonte sans raison des pelouses à ras. Fini aussi le choix de végétaux inadaptés au contexte local. La mode du palmier coûte que coûte est derrière nous : le climat en a ramené plus d'un à la raison. En remettant au goût du jour des modes de gestion plus alternatifs, qui laissent par exemple s'épanouir des prairies urbaines qui plaisent en plus aux habitants, nous redonnons du sens à l'action publique.
Le métier de jardinier change-t-il ?
Il s'élargit : le jardinier devient un médiateur, un fin pédagogue lorsqu'il intervient en jardin partagé ou anime une visite de terrain. Il affirme aussi son rôle de décorateur en maîtrisant l'art floral. Dans tous les cas, c'est un passionné, car on fait rarement ce métier par défaut. Non délocalisable, le secteur est dynamique et en pleine croissance.
É c h a p p e - t- i l dans les collec tivités aux coupes budgétaires ?
C'est plus subtil. À budget constant, nous héritons de plus de surfaces à gérer qu'auparavant. C'est comme si, dans une ville, on ouvrait des crèches sans prévoir de nouveaux postes ! Chez Hortis, nous militons aux côtés de la filière horticole pour changer la donne et faire reconnaître la valeur ajoutée que nous apportons. Le but est de fédérer le maximum de responsables de jardins ouverts au public. Nous sommes 800, mais pouvons faire mieux ! Des risques liés à l'exercice du métier jusqu'au boom des jardins thérapeutiques au sein des hôpitaux, en passant par le zéro phyto, aucun sujet de débat n'est écarté.
Où en débattez-vous ?
Dans le cadre des journées techniques que les groupes régionaux d'Hortis organisent régulièrement. Les 10 et 11 octobre, à Pau, notre congrès national sera aussi l'occasion de parler de la gestion différenciée dans les jardins historiques, c'est-à-dire ceux des châteaux ou des musées. Qu'elles viennent de petites ou de grandes collectivités, toutes les expériences sont bonnes à partager. L'écueil serait d'uniformiser les pratiques : chaque service des espaces verts est unique, et c'est bien ainsi.
Quels sont les enjeux de demain ?
Même si des efforts restent à fournir en termes de recherche d'économies d'eau et d'énergie, un plafond semble atteint dans ces domaines. Les niveaux de progrès étant variables d'une collectivité à l'autre, certaines doivent rattraper leur retard. Il est surtout temps d'améliorer les synergies entre la manière dont les espaces sont conçus et la façon dont nous les gérons. Il faut que les concepteurs de parcs et jardins aient des missions pour accompagner la gestion de ces espaces une fois qu'ils sont créés.