Que nous apprennent les études comparatives des dispositifs européens de concertation ?
Nous avons décortiqué trois procédures récentes, l'assemblée participative électronique organisée à Poitiers en 2008, la conférence World Wide Views on Climate Change organisée dans le cadre du Sommet de Copenhague sur le climat en 2009 et le débat public sur l'usine de valorisation énergétique d'Ivry-sur-Seine, qui s'est également tenu en 2009. Ce sont des dispositifs hybrides qui marient rencontres en face-à-face et internet. Nous avons constaté que la plupart des acteurs – associations, élus, grand public – ressortaient déçus des réunions publiques, parce que le temps de parole y est compté, les discours très formatés et l'expression captée par les plus habitués à parler devant une assemblée. L'espace internet permet, en revanche, d'y développer une argumentation plus fouillée, de prendre la parole plus fréquemment et de diffuser une expertise contradictoire. On s'y exprime plus librement, loin des rapports de domination qui s'installent dans les instances publiques. Encore faut-il que le site internet le permette vraiment et ne soit pas un lieu déserté par les initiateurs du débat.
Y a-t-il des règles à respecter pour réussir un débat ?
Deux réflexions de fond sont à mener : la question du périmètre du sujet à aborder et celle du public à toucher. Dans nos entretiens avec des participants aux débats étudiés, nous avons remarqué que le cadrage de la discussion était primordial. Le débat se déroule d'autant mieux que le sujet est bien circonscrit, son périmètre parfaitement défini. Savoir à qui on s'adresse est également essentiel. On met en œuvre des procédures différentes selon que l'on parle à un vaste public, ou bien seulement à des riverains ou à un auditoire restreint de personnes très concernées. Les collectivités et les pouvoirs publics ont à leur disposition une trentaine de dispositifs différents de débat public, comme le panel représentatif d'une population ou la conférence de citoyens. Ces procédures sont plus ou moins efficaces selon le sujet traité et le public visé. Les trois dispositifs étudiés ont permis en tout cas aux citoyens d'améliorer leurs connaissances sur le sujet et d'identifier les enjeux globaux.
Quelles erreurs éviter ?
Les personnes que nous avons interrogées ont toutes insisté sur l'utilité de leur participation. Trop souvent, les participants ont l'impression que leur avis ne sera pas pris en compte, que les jeux sont déjà faits et les décisions prises. Malheureusement, cela arrive. On prend dès lors le risque que les citoyens ne se détournent des dispositifs participatifs, par lassitude et épuisement, et finissent par dénoncer ces procédures auxquelles ils avaient pourtant accordé un véritable crédit.