Un essai grandeur nature. Enerfip est une plateforme de financement participatif spécialisée dans la transition énergétique. Fondée à la mi-2015, elle a voulu tester la robustesse de la technologie blockchain. Celle-ci promet de révolutionner les échanges d’informations en stockant et transmettant les données de façon décentralisée sans intermédiaires, directement de pair à pair. Son application la plus connue est la monnaie numérique bitcoin. Mais plus largement, son essor est suivi de près par le monde de l’énergie et par la finance, en particulier la finance participative. La blockchain accentue une tendance à la décentralisation déjà observée avec le développement des énergies renouvelables. Certains imaginent, par exemple, l’utiliser pour gérer des circuits courts où des citoyens producteurs d’électricité vendraient leurs électrons directement à leurs voisins.Pour l’instant, c’est pour des raisons beaucoup plus terre à terre qu’Enerfip a lancé son expérimentation cet été. « Dans nos projets ouverts au financement participatif, il est impératif de tenir un registre des souscripteurs. Ce qui s’avère assez lourd, donc coûteux, à gérer pour les porteurs de projets. La blockchain pourrait supprimer cette contrainte en automatisant la tenue du registre », envisage Léo Lemordant, président d’Enerfip. Encore faut-il s’assurer de la sécurité de la procédure. C’est ce qu’a voulu vérifier la plateforme en simulant une opération grâce à la monnaie numérique bitcoin.Plus précisément, Enerfip a profité d’une campagne qu’elle réalisait pour un projet d’approvisionnement en bois-énergie en Isère. Celui-ci a été soumis à la procédure de financement participatif habituelle. En complément, Enerfip a transcrit l’opération dans la monnaie bitcoin. C’est-à-dire qu’elle a utilisé la blockchain à la base du bitcoin pour enregistrer les souscriptions des épargnants. « Nous avons décidé qu’Enerfip serait l’agent qui crée les comptes des souscripteurs sur bitcoin. Nous maîtrisons ainsi la correspondance entre leur identité et leur pseudonyme sur la blockchain. Donc leur anonymat », précise Léo Lemordant. Au final, les résultats sont plutôt concluants. Pour Enerfip, cet essai valide l’idée d’utiliser la blockchain pour le financement participatif. Reste à définir des règles du jeu. Cette expérimentation visait d’ailleurs à faire des recommandations techniques au législateur avant la parution de décrets sur le sujet.Thomas Blosseville