0,5 % de teneur en soufre dans les carburants maritimes : c’est le plafond en vigueur au niveau mondial depuis le 1er janvier (1). Comparé aux 3,5 % antérieurs, ce seuil fixé par l’Organisation maritime internationale (OMI) doit diviser par 7 les émissions de d’oxyde de soufre (SOx) du transport maritime (fret, pêche, tourisme, soit quelque 100 000 navires). Le contrôle de son respect et les éventuelles sanctions incombent aux Etats.
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Assurant 90 % des échanges commerciaux, le transport maritime génère 14 % des rejets mondiaux de SOx. Sans verdissement du carburant, les décès prématurés dus à ce polluant se chiffreraient à 570.000 dans le monde entre 2020 et 2025, selon une étude de l’OMI de 2016. Sans compter l’acidification des océans.
Le transport maritime utilise massivement du fioul lourd (45 % de la consommation mondiale), issu de résidus du raffinage du pétrole brut. Pour tenir la nouvelle valeur-limite, les navires doivent être dotés de systèmes d’épuration des fumées (scrubbers), dont les boues sont larguées en mer ou déposées à terre. « Une solution énergivore, qui élève de quelques pourcents la consommation de carburant », souligne Philippe Berterottière, PDG de Gaztransport et Technigaz (GTT). Autres limites : les rejets en mer et dans les ports sont proscrits par la Chine et deux des trois principaux ports mondiaux (Singapour et Fujaïrah, Emirats arabes unis), les Etats-Unis emboîtant le pas. Le traitement à terre des résidus d’épuration est onéreux, tout comme les carburants à basse teneur en soufre (fioul lourd peu soufré, diesel marin), dont le coût peut atteindre le double de celui du fioul lourd, selon GTT.
Une conjoncture favorable au GNL
La société d’ingénierie spécialisée dans le gaz naturel liquéfié (GNL) entrevoit donc une activité soutenue sur le créneau des grands bateaux, auxquels sont adaptées ses vastes cuves cryogéniques (conservant le carburant à – 163 °C). Quelque 200 navires commerciaux sont propulsés au GNL et autant sont en commande (soit 5 % des commandes totales). « La conjoncture est favorable, tirée par les méthaniseurs, note Philippe Berterottière. La Marine nationale s’intéresse au GNL, qui propulsera aussi des bateaux de pêche, qui auraient intérêt à récupérer les calories de froid pour conserver le poisson. Un navire de haute mer sur deux recourra au GNV en 2050, projette la société de classification norvégienne DNV ».
Si l’investissement initial pour l’armateur est élevé (infrastructure d’approvisionnement, stockage à bord, moteur adapté), il s’amortit sur 7-8 ans, voire 2-3 pour un très grand porte-conteneurs, selon GTT. L’entreprise en équipera 9 pour la CMA CGM et en convertit un pour l’armateur allemand Hapag Lloyd. Elle fournit aussi les réservoirs du premier brise-glace touristique utilisant du GNL du croisiériste Ponant. L’OMI vise une baisse de 40 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 et de 50 % en 2050 (par rapport à 2008). « Le GNL peut être la solution en 2030 et, combiné à la réduction de vitesse, une partie de la solution en 2050 », estime Philippe Berterottière.
(1) : A noter que depuis 2015, la teneur en soufre du fioul lourd est limitée à 0,1 % dans les zones d’émission contrôlée : mers Baltique et du Nord, zones côtières du Canada et des Etats-Unis et zone Caraïbe des Etats-Unis. Plusieurs Etats riverains de la Méditerranée sont candidats à ce régime, basé sur un taux qui reste dix fois supérieur à celui admis en Europe pour les carburants routiers.