Un grain de sable réglementaire ou conjoncturel peut vite laisser place au découragement et au renoncement. La baisse du prix du pétrole, les contraintes réglementaires peuvent être lourdes de conséquences pour les activités de traitement de déchets. Comme les matières premières, les matières recyclées subissent les affres de la crise mondiale.
Dans le rapport 2015 du Cyclope sous-titré Pour qui sonne le glas ?, Philippe Chalmin et son équipe, fidèles au poste, estiment que les fluctuations de prix des commodities, y compris les scrap commodities, continueront tant que les crises économiques et politiques pèseront sur les pays émergents comme les Brics, et tant que la gouvernance internationale ne sera pas capable de trouver un terrain d'entente sur le réchauffement climatique et les règles commerciales.
En Europe, l'économie circulaire est installée dans les textes à Bruxelles ; en France, dans le projet de loi sur la transition énergétique et dans Le Petit Larousse, depuis quelques semaines. Le signe que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Loin de là. Il suffit de constater les nombreuses contradictions des réglementations. Si Bruxelles a compris qu'il faut préserver les ressources en recyclant plus, les objectifs fixés ne sont pas en adéquation : « La directive sur les déchets révisée table sur des objectifs quantitatifs, alors que l'enjeu porte sur des matières spécifiques comme les métaux stratégiques, rappelle Patrice Christmann, directeur au BRGM. Hormis l'or ou l'argent, les petits métaux représentent moins de 1 % des matières utilisées dans nos appareils électroniques. Pourtant, le défiporte sur cette capacité technologique à récupérer ces fractions infimes. » D'autres réglementations, comme Reach ou celles relatives aux déchets dangereux, donnent lieu à des inquiétudes pour l'industrie du recyclage : le risque de ne pouvoir recycler des déchets de PVC ou des plastiques issus de DEEE contenant des métaux lourds ou des substances interdites aujourd'hui. Faut-il pour autant stopper la recherche et les investissements en plein vol ? Les recycleurs, avertis et perspicaces, savent que l'innovation est leur moteur. C'est une façon de se projeter dans l'avenir aussi, synonyme d'optimisme et de confiance. En témoignent plusieurs dossiers de votre magazine : les presses à balles et les compacteurs n'échappent pas à cette recherche de performance ; le big data au service des déchets est devenu réalité avec une offre riche destinée aux entreprises et aux collectivités locales. Enfin, imaginons déjà des installations capables de neutraliser toutes les nanoparticules contenues dans nos déchets. La recherche avance et les entreprises du recyclage aussi, et c'est tant mieux. Selon Björn Grufman, ex-président du BIR, les recycleurs doivent encore innover pour offrir le meilleur de la matière recyclée, digne de pouvoir concurrencer la matière vierge : « Il est nécessaire de vous développer ou c'est la mort assurée. »