La 7 e édition de RuraliTIC, l'Université d'été des TIC pour territoires, se déroulera à Aurillac, les 12 et 13 septembre prochains. Ce sera l'occasion d'assister au lancement du Territorial Business Act, un dispositif privilégiant l'installation et le développement d'activités économiques innovantes des territoires grâce au numérique. Journal des Communes Durables : Le très haut débit est-il une priorité pour les maires ruraux ? Serge Pilicer : En 2011, une enquête conjointement menée par l'Association des maires ruraux de France (AMRF) et Ruralitic montrait que 95 % des maires ruraux voulaient le Très Haut Débit (TDH) chez eux à cinq ans. En 2010, nous avions posé la question aux élus sur leurs priorités pour leur commune : le transport, l'éducation et le social arrivaient en tête, un an après, le THD occupait la première place. Les élus ont pris conscience de l'intérêt du numérique comme outil de développement économique et de cohésion sociale de leur territoire, pour la commune, pour leurs citoyens et les entreprises locales. Aujourd'hui, le THD est considéré comme prioritaire pour inverser le flux des populations vers les grandes agglomérations et devient une composante essentielle pour relancer l'attractivité territoriale. JCD : Quelles solutions numériques sont les mieux adaptées pour les communes rurales ? S.P. : La fibre optique est adaptée pour couvrir environ 90 % du territoire. C'est une technologie facile à mettre en œuvre, excepté en zones de montagne, où les travaux d'ingénierie sont très coûteux compte tenu des accidents topographiques. En plus du THD, il existe d'autres technologies et/ou techniques différentes et alternatives : le satellite, l'utilisation de l'aérien (réseau électrique non enfoui) et la technologie Wimax encore peu déployée en France. La technologie du satellite a vu son horizon s'élargir considérablement avec l'offre KSAT d'Eutelsat, une solution dédiée à l'internet HD et aux solutions déployées par Nordnet (filiale de Orange sur l'offre satellite de ASTRA SES, mais l'ambition affichée n'est de répondre qu'aux besoins de 10 % maximum du territoire). En France, la solution de déploiement de l'internet HD par voie aérienne est proposée par Arteria, filiale de RTE (Groupe EDF), un acteur public au service de l'aménagement numérique du territoire qui met à disposition de ses clients le haut et le THD sur les réseaux électriques aériens. L'écueil avec cette technique est qu'elle est soumise aux aléas des fortes d'intempéries qui entraînent une double perturbation sur les réseaux électriques et internet.Le choix entre ces différentes solutions dépend donc du contexte géographique et économique de chaque territoire concerné. Ruralitic est une plateforme de dialogue neutre et éclectique, qui ne peut prendre position sur les arbitrages technologiques territoriaux, mais il semble absurde de creuser des tranchées pour mettre en place une fibre optique à plus de 2 000 m d'altitude. Cependant, si des travaux routiers sont prévus, il peut quand même être judicieux de mutualiser l'ensemble des opérations d'ingénierie pour installer le THD partout sur le territoire. JCD : Pendant RuraliTIC, les acteurs privés vont préciser leur plan de déploiement d'infrastructures : ce plan est-il rassurant pour l'avenir des communes rurales ? S.P. : A mon sens, ce plan sera rassurant quand les industriels et l'Etat auront défini un plan national du THD. D'un côté, les acteurs privés ne s'engageront pas dans les zones les moins rentables au risque de renforcer la fracture numérique, de peur que cela ne soit pas rentable et, de l'autre, l'État n'a pas massivement poussé le THD comme un élément essentiel de la revitalisation de tous les territoires. Le sujet de la péréquation nous rappelle que les territoires n'ont pas les mêmes ressources. La question n'est pas de savoir si un territoire saurait ou non apporter le THD sur son périmètre. La vraie question est que l'État se dote d'un plan Marshal sur le THD, à échéance courte. RuraliTic 2012 proposera des pistes de réflexion et d'action comme le Territorial Business Act : le numérique, créateur d'activités et de richesses locales, doit être au cœur d'un véritable dispositif privilégiant l'installation et le développement d'activités économiques innovantes au plus profond des territoires. L'investissement public, et à terme la commande publique, peut être le cœur de cette révolution de mentalités et d'actions ! Permettre l'innovation dans tous les territoires, est une bonne chose, si cela débouche sur un progrès que l'on mesure en tant que bénéfice pour le citoyen ou l'entreprise. Cela contribuera à la poursuite de l'évolution du solde migratoire des campagnes. Car aujourd'hui, un Français sur quatre vit en zone rurale, mais seulement un sur huit y travaille. Le numérique est donc une opportunité historique de repenser cette situation. www.ruralitic.org