Journal des Communes Durables : Pourquoi accompagner le phénomène d'urbanisation ?
François Richard : Plus de la moitié de la population mondiale vit désormais en milieu urbain. Les conséquences pour l'équilibre social, économique, environnemental des territoires sont considérables, ici comme ailleurs. Tous les acteurs publics ou privés, responsables, et susceptibles de contribuer aux transformations nécessaires à un mieux vivre ensemble tentent de répondre aux enjeux de cette urbanisation rapide et irréversible, en apportant des solutions adaptées. C'est le cas de France Télécom-Orange qui, à travers son programme stratégique Smart Cities (voir encadré), place les technologies et solutions numériques au cœur de la dynamique de transformation des territoires pour une ville intelligente.
JCD : Que recouvre le concept de ville intelligente ?
F.R. : Le numérique représente une chance pour mieux répondre à la complexité croissante de la gestion des villes (eau, énergies, ordures, transports, relation avec les citoyens…) dont l'enjeu est l'interconnexion intelligente entre eux, mais aussi aux défis énergétiques et climatiques qu'elles se doivent de relever. Cette double approche, intégrée et transversale qui tient compte de l'ensemble des enjeux qui se posent aux territoires urbains permet le déploiement d'opérations d'aménagement, en faveur, par exemple, de la mobilité « décarbo-née », d'une ville plus sobre en termes de consommation d'énergie, mais aussi plus accueillante, économe, facile à vivre… Il s'agit de s'appuyer sur tous les potentiels des nouvelles technologies de l'information et ce très en amont des projets, afin de développer de nouveaux modes de conception et de gestion de la ville.
JCD : Quel visage prend la ville intelligente aujourd'hui ?
F.R. : C'est une ville grande, moyenne ou petite qui s'engage dans une démarche spécifique de lutte contre le gaspillage des ressources, d'économies d'énergie et budgétaire, de souci d'un meilleur service public rendu aux habitants… À l'image de Gen-sac-la-Pallue (Charente, 1 604 hab.) qui gère son système d'assainissement à distance via son réseau de téléphonie mobile afin d'optimiser le fonctionnement des stations d'assainissement. La commune a équipé son réseau d'un système automatique de surveillance et de contrôle. Un dispositif d'alerte sur mobile prévient le personnel d'astreinte en cas de dysfonctionnement. Au Chambon-Feugerolles (Loire, 12 992 hab.), c'est la télégestion des équipements de chauffage de trente sites municipaux qui est accessible depuis un simple ordinateur, via un navigateur internet. Enfin, à Cholet (Maine-et-Loire, 54 121 hab.), c'est tout le système d'arrosage automatique des espaces verts qui est programmé et centralisé pour consommer mieux et moins d'eau.
Les grandes villes, telles que Lyon, Nantes ou Lille engagent une dynamique de transformation plus globale et ambitieuse aux côtés des citoyens et des industriels dont Orange. Elle associe le volet optimisation de la gestion et des modes de fonctionnement de la collectivité aux services numériques accessibles aux citoyens, pour mieux vivre leur ville, en temps réel. D'autres déploient des programmes d'envergure telle que la télégestion des équipements urbains comme les parcmètres à Strasbourg.
Chaque territoire urbanisé est en mesure aujourd'hui, en fonction de ses besoins, de faire de sa ville intelligente une réalité pour tous. Construire la ville intelligente, c'est investir pour l'avenir.
JCD : Quel visage pour le territoire urbain durable demain ?
F.R. : Une ville plus dense et intense quelle que soit sa taille… mais plus fluide en termes de mobilité, d'échanges d'informations, de prise de décision et de concertation. Avec une coopération entre les habitants plus marquée à l'échelle de leur quartier. Une meilleure connaissance de leur environnement par tous les acteurs locaux devrait permettre une meilleure gestion du territoire et de la vie quotidienne de ses habitants.
En termes de gestion, la ville pourra se doter de capteurs intelligents disséminés sur tout le territoire pour identifier les fuites d'eau, déclencher l'éclairage public ou signaler un dysfonctionnement dans ce domaine, mieux gérer le stationnement public, transmettre les informations concernant le taux de pollution de l'air de l'eau… Bref, un ensemble de données collectées en temps réel et nécessaires à une prise de décision plus efficace et efficiente des services publics rendus aux habitants. Son pilotage se fait grâce à un tableau de bord présentant l'ensemble des flux échangés dans le cadre de la gestion de la collectivité avec une capacité d'intervention, en temps réel, des équipes techniques.
Du côté des citoyens, la concertation et la participation seraient renforcées grâce aux outils numériques en leur possession et aux applications mises à disposition par les collectivités en la matière. Les habitants auraient toutes les informations pour comprendre comment la ville évolue et participer activement à la vie de son quartier. La pédagogie et l'accompagnement des citoyens sont des préalables fondamentaux à cette transformation car rendre la ville plus pratique, vivable et durable nécessite des changements de comportements profonds inscrits dans la durée…
Enfin, en termes d'organisation de la collectivité, l'approche métier/secteur de type verticale serait profondément remaniée au bénéfice d'une interaction accrue entre les métiers. Les DSI (Directeur du système d'information) des collectivités territoriales sont au cœur de cette transformation. L'approche transversale des projets devrait considérablement faire évoluer leur métier. En tant que force de proposition, ils seraient impliqués très en amont sur les dossiers, conférant une position éminemment stratégique à leur fonction. Un métier d'avenir dans la Territoriale ! n