Parmi les géants majestueux de nos mers, le diable de mer, également appelé raie mobula mobular, est désormais au bord du gouffre. L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) vient de reclasser officiellement l’espèce en « danger critique d’extinction » à l’échelle mondiale. Une alerte rouge absolue pour ce poisson emblématique de la Méditerranée, victime d’un effondrement brutal de sa population en seulement sept ans.
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Menaces multiples et mortalité inquiétante
Alors que la France interdit strictement sa capture sur son territoire maritime, le diable de mer reste massivement menacé à l’échelle internationale. Il est encore victime de prises accidentelles dans les filets de pêche industrielle. Dans certaines régions du globe, il fait même l’objet de pêches ciblées et intensives pour répondre à la demande asiatique, notamment pour le commerce illégal de branchies. À ces pressions directes s’ajoutent les effets de la pollution marine, du réchauffement des océans, du trafic maritime croissant et de la dégradation générale des habitats côtiers. L’été dernier, plusieurs échouages de mobulas sur les plages françaises ont fortement alerté la communauté scientifique et mis en lumière l’extrême vulnérabilité de cette espèce.
Un manque criant de connaissances
À ces menaces s’ajoute un obstacle majeur : l’insuffisance des connaissances scientifiques disponibles. Faute d’informations fiables sur ses parcours migratoires, ses zones de reproduction ou sa structure de population, il reste difficile de mettre en place un plan de protection efficace et internationalement coordonné. C’est précisément pour combler ce déficit que la Fondation de la Mer soutient depuis plusieurs années l’association AILERONS, basée à Montpellier et spécialisée dans l’étude et la conservation des raies et requins de Méditerranée.
Cette collaboration s’appuie sur des méthodes de recherche modernes. La photo-identification permet de reconnaître individuellement les mobulas grâce aux motifs uniques présents sur leur ventre et d’assurer un suivi sur le long terme. Des balises satellitaires sont utilisées pour tracer leurs déplacements et comprendre leurs routes migratoires. Des prélèvements génétiques complètent ces observations, en fournissant des données inédites sur leur reproduction et leur évolution. Parallèlement, des campagnes d’observations impliquent scientifiques, pêcheurs et citoyens afin de collecter davantage de données de terrain.
« Agir avant qu’il ne soit trop tard »
Ces travaux sont inscrits dans un réseau scientifique international qui ambitionne de combler le manque de connaissances et de bâtir une stratégie mondiale de conservation. Pour Alexandre Iaschine, directeur général de la Fondation de la Mer, la mobilisation est urgente : « Le manque de connaissance sur la raie mobula freine les efforts de conservation. Les missions que nous soutenons, notamment celles menées par l’association AILERONS, sont indispensables. Elles visent à mieux comprendre ces espèces afin de combler ce déficit de connaissance et pouvoir mettre en place des mesures de protection efficaces et durables. Ensemble, nous œuvrons dans un seul but : préserver la vie marine et la biodiversité des océans, essentielles à l’équilibre de notre planète. »
Symbole de la biodiversité méditerranéenne, le diable de mer est aujourd’hui le reflet d’un océan en souffrance.