Eau de Paris (EDP) a inauguré le 30 juin son usine d'affinage de L'Haÿ-les-Roses, dans le Val-de-Marne. Elle traite l'eau prélevée à 120 kilomètres de là, dans la région de Sens, et qui est transportée en gravitaire par l'aqueduc de la Vanne. Auparavant, l'eau ne subissait pas de traitement, mais le renforcement des normes concernant les pesticides et la microbiologie a conduit la régie à réaliser cet investissement de 58 millions d'euros, complété par la construction d'une conduite de DN 1200 sur six kilomètres (fin des travaux prévue pour fin 2011) pour un coût supplémentaire de 30 millions d'euros ; l'eau sera ainsi acheminée sous pression vers Paris. « Cela donne une idée du coût du curatif quand le préventif n'est pas suffisant », souligne Thierry Wahl, directeur général d'EDP. En parallèle, des actions sont en effet menées pour acquérir des terrains et protéger les captages, mais ce type de politique prend du temps pour être efficace.
DEUX ANS DE RÉGLAGE
Au cours de cette inauguration, Anne Le Strat, présidente d'EDP, a souligné le caractère « long et laborieux » du chantier. Les préétudes datent en effet de 2003 ; les études ont été réalisées en 2005 ; les travaux ont duré de 2006 à 2008 ; et la mise en route de l'usine a été longue. En effet, deux ans ont été nécessaires pour régler le procédé d'OTV ( Veolia Eau), car il s'agit d'une première à cette échelle. La difficulté résulte du couplage de deux techniques. La première est une coagulation-floculation réalisée dans un décanteur lamellaire Multiflo Trio, avec ajout en continu de charbon actif en poudre (pour adsorber les pesticides), de chlorure ferrique (pour coaguler le charbon actif) et de polymère (pour la floculation). « Cette étape est dimensionnée pour traiter des eaux à 5 NFU pendant 95 % du temps, et absorber les pointes à 10 NFU », souligne Anibal Guerreiro, en charge de l'exploitation de l'usine.
ENTIÈREMENT AUTOMATIQUE
La deuxième technique est une ultrafiltration de type frontal (procédé Opaline d'OTV). L'eau subit un prétraitement avec un tamisage à 130 microns, afin de protéger les membranes d'un colmatage par les particules. Puis vient un étage d'ultrafiltration primaire, constitué de douze skids comprenant 1 380 modules de filtration d'Hydranautics (63 000 m2 de surface filtrante). L'étage secondaire est composé de quatre skids comportant chacun vingt-six modules et permet de recycler les eaux résultant des lavages non chimiques des membranes. Un rendement hydraulique de 99 % est ainsi visé. Un lavage est fait toutes les heures à l'air et l'eau, toutes les six heures à l'eau de Javel, et tous les douze jours à l'acide et à la soude. Les 1 % d'effluents résultant des lavages chimiques sont neutralisés et partent dans le réseau d'assainissement. « Cette usine a été construite pour être entièrement automatique. Elle est silencieuse, sans odeur, sans climatisation (juste de la ventilation) et sa consommation d'énergie est assez faible », souligne Anibal Guerreiro.
Coupler ces deux techniques aura donc pris du temps, mais pour Anne Le Strat, c'est aussi le rôle d'un grand service d'eau que de « collaborer avec les entreprises privées pour inventer et développer de nouveaux procédés ».