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ENERGIE

Quelle méthanisation choisir ?

LA RÉDACTION, LE 1er OCTOBRE 2012
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1 Méthaniser ou cométhaniser ? Il est intéressant de brasser des biodéchets d'origines différentes dans un méthaniseur, car cela homogénéise le pouvoir méthanogène et lisse la production d'énergie. Mais cela influe sur le choix du mode de traitement, sec ou liquide. La palette de déchets qu'on peut orienter vers la méthanisation est très large. Les trois grandes catégories de détenteurs en produisent toutes : industriels (sous-produits de l'industrie agroalimentaire, écarts de production, produits périmés), agriculteurs (lisiers, fumiers, déchets de maraîchage et d'horticulture), collectivités locales (biodéchets ménagers, boues de station d'épuration, déchets de marchés). Mais faut-il les rassembler en un même lieu pour les méthaniser ensemble, ou respecter une certaine segmentation ? En théorie comme en pratique, tout pousse à faire des mélanges. « Les déchets sont mélangés selon différentes “recettes” avec l'objectif de parvenir à un potentiel de méthanisation stable », in dique Alice Delaire, responsable d'Artois méthanisation, un site flambant neuf de Veolia Propreté, à Arras. Cette usine, inaugurée fin juin, cométhanise 25 000 t/ an de déchets organiques issus de l'agriculture (biomasse agricole, racines d'endives…), des industries (boues biologiques, graisses de flottation, écarts de fabrication, déchets carnés, graisses de restauration), des collectivités (tontes de pelouses, déchets de cantines collectives, déchets de stations d'épuration) et de la grande distribution. L'intérêt de brasser différents déchets est donc d'homogénéiser leur pouvoir méthanogène, certains dégageant moins de biogaz que d'autres, et de lisser celui-ci tout au long de l'année afin de produire de l'énergie à des débits relativement constants d'une saison sur l'autre. À Calais, l'usine de méthanisation d'Urbaser accepte ainsi des déchets gras d'origine industrielle pour « doper » le pouvoir méthanogène des biodéchets ménagers constituant la plus grande part du gisement entrant. Ratio : 1 000 t/an de gras pour 27 000 t/an de biodéchets. « Le potentiel méthanogène d'une tonne de déchets est très variable d'une source à l'autre et les producteurs combinent les différentes sortes afin d'optimiser leur production, explique Philippe-Jean Garnier, directeur de l'offre chez GRTgaz, chez qui les gros méthaniseurs peuvent injecter leur biogaz comme gaz naturel (lire article suivant). Par exemple : une tonne de lisier bovin permet de produire entre 15 et 20 m3 de biogaz, une tonne de biodé-chets ménagers environ 70 m3 de biogaz, une tonne de résidus de céréales environ 300 m3 . Aussi, la conversion déchet/débit doit-elle être calculée au cas par cas. » Ainsi, à Fresnoy-Folny (76), la plateforme d'Ikos s'est composé son propre bouquet énergétique à base de lisiers, de boues de Step, de tontes de pelouses, de fruits et légumes, de graisses et de lactosérum d'industries agroalimentaires, de déchets de céréales et de cantines. En Bretagne, l'usine Geotexia traite 35 000 t/an de lisiers agricoles et 40 000 t/an de coproduits issus d'entreprises agroalimentaires locales, dont plusieurs abattoirs. En Seine-et-Marne, Bioénergie de la Brie associe à des lisiers et fumiers bovins des boues, des déchets de fromageries et des déchets de céréales. Enfin, à Auch (32), le projet des entreprises Naskeo et Verdesis opérera un mélange de déchets agricoles (20 %) et de déchets agroalimentaires (80 %), le tout pour 40 000 t/an. Mais plus l'origine des déchets est variée et les fournisseurs sont multiples, plus l'usine fonctionnera sur un mode centralisé, avec gros volumes et gros débits. Cela n'est pas sans conséquences sur son régime ICPE, surtout sur le montage du dossier. Avant de construire l'usine, il faudra ainsi définir un périmètre de collecte qui dépasse le simple cadre communal, voire départemental, sécuriser les flux des différents détenteurs de déchets et arrêter des fréquences de ramassage qui ne soient pas préjudiciables à l'homogénéité de la matière traitée. Sauf à pouvoir stocker en grande quantité, une usine qui méthanise des graisses le lundi, des déchets secs le mardi, et des tontes de pelouse le mercredi, sera vite rappelée à l'ordre par ceux qui achètent l'énergie produite, car cette énergie ne sortira pas à débit constant. Par ailleurs, à gisement multiple correspond valorisation multiple : chaque détenteur de déchets s'attend à recevoir une partie du produit issu de la méthanisation. Il faut donc veiller à ne pas réserver le compost ou la chaleur à un seul exutoire, et satisfaire tout le monde, dans les limites du techniquement possible. La notion d'écosystème prend ici tout son sens, sachant que pour une entreprise, il est très valorisant commercialement de faire partie d'une économie circulaire. Cet écosystème peut être plus restreint et se cantonner, par exemple, à une coopérative agricole, du moment que les adhérents ne pratiquent pas tous la même culture. C'est le sens des appels à projets de l'Ademe en régions pour des unités de méthanisation agricole de moins de 75 kWe, qui expiraient le 7 septembre dernier. Ils se voulaient « proposer des solutions à la majorité des exploitations d'élevage fran çaises, c'est-à-dire des exploitations agricoles orientées en polyculture élevage, de bovins ou de volailles, qui peuvent être sur lisier mais également sur fumier ». En somme, tout, sauf la monoculture ou le mono-élevage. Rassembler sur un même site des déchets organiques de plusieurs origines a malgré tout un effet sur le choix du mode de traitement. Il faut ici distinguer voie sèche et voie humide. La première solution convient davantage aux mélanges affichant une importante proportion de biomasse sèche, environ 35 %, par exemple des tailles de haie ou des déchets paillés. Elle affiche un meilleur bilan énergétique. « Normal, puisque les déchets secs sont plus mé tha no gènes, explique Alice Delaire. Mais ce bilan est pénalisé par l'importante consommation d'énergie des procédés de convoyage et d'agitation des déchets, équipements beaucoup plus lourds qu'en voie liquide. » Sur Artois Méthanisation, la jeune femme conduit un procédé liquide, car ses déchets pro duisent moins de 150 g/l de matière sèche dans le digestat. « Entre 150 et 350 g/l, il faut passer en voie sèche, comme les constructeurs des premières usines françaises (Amiens, Calais, Montpellier, Varennes-Jarcy), car leur gisement vient surtout de la fraction fermentescible des ordures ménagères. C'est au détriment de la souplesse d'exploitation : les bouchons sont fréquents, les casses de matériel aussi », poursuit-elle. Sinon, il est toujours possible de fluidifier le déchet, en y incorporant des biodéchets liquides, mais attention à ne pas rendre le mélange visqueux au point d'amener la vis d'alimentation du digesteur à tourner dans le vide. À l'inverse, en voie liquide, il est possible d'incorporer des déchets secs aux déchets liquides sans porter préjudice aux équipements de convoyage : broyé, le biodéchet solide devient aussi pompable que le biodéchet liquide. 2 Quelle valorisation choisir ? Chaleur, électricité, carburant, injection dans un gazoduc : quatre voies de valorisation s'offrent au producteur de biogaz de méthanisation. Laquelle choisir ? On le sait, le méthane présente un pouvoir de réchauffement climatique vingt fois supérieur au CO 2 . Pour limiter l'effet de serre, il vaut mieux le brûler plutôt que de l'envoyer tel quel à l'atmosphère. C'est ce que font les torchères de plateformes pétrolières avec le gaz fossile. Mais c'est un moindre mal. Il est plus pertinent de récupérer l'énergie produite par la combustion. En France, il existe quatre voies de valorisation possibles : sous forme de chaleur, d'électricité, de carburant et, depuis peu, de biométhane. La valorisation chaleur est la plus simple à réaliser : les calories produites par la combustion du biogaz dans un moteur à gaz sont utilisées pour alimenter un autre procédé industriel. C'est la filière qu'emprunte la plupart des biogaz de décharge. La chaleur alimente le procédé de traitement des lixiviats, autre sous-produit de la dégradation des déchets enfouis. Les stations d'épuration, qui n'ont pas accès à la valorisation du biométhane, y ont également recours. Avantage : l'énergie est utilisée en boucle fermée, et ne fait intervenir aucun acteur extérieur. Ce n'est pas le cas de la valorisation en électricité, qui peut se réaliser en même temps que la valorisation chaleur, avec une turbine à gaz (il y a alors cogénération). En effet, le courant est vendu à l'extérieur du site, dans le cadre d'un contrat d'achat à tarif garanti avec EDF. C'est la valorisation la plus pratiquée en France, avec 191 MW sous contrat, selon le dernier baromètre d'Observ'ER. En 2010, le seuil des 1 000 GWh de production électrique a été franchi, mais l'objectif pour 2020 est bien supérieur : 3 700 GWh. Distinct du biogaz de décharge, le tarif d'achat du courant produit avec du biogaz de méthanisation a été revalorisé l'an dernier (de 11,19 à 13,37 centimes le kilowattheure selon la puissance, hors prime à l'efficacité énergétique), mais la filière attendait davantage : il « ne permet pas le développement sans un soutien par des subventions, martèle le Club biogaz de l'ATEE (Association technique énergie-environnement). L'association attribue à ce cadre peu incitatif certaines aberrations. « Par exemple, la fuite de déchets organiques à fort potentiel vers les pays frontaliers présente un bilan environnemental aberrant et ampute durablement la rentabilité des projets français », dénonce-t-elle. Chaleur et électricité supposent une combustion du biogaz. Ce qui n'est pas le cas des deux dernières formes de valorisation, le biométhane et le bio-GNV. Le producteur se contente là (mais ce n'est pas une mince affaire) d'une épuration. L'autorisation, donnée l'an dernier, d'injecter son biogaz épuré dans le réseau de gaz naturel a créé un gros appel d'air chez les porteurs de projets de méthanisation. Suivant le débit, le producteur de biométhane s'adressera soit à GRDF, principal gestionnaire du réseau de distribution, soit à GRTgaz, gestionnaire du réseau de transport (ou TIGF dans le Sud-Ouest). Chez GRDF, on instruit actuellement 280 demandes d'injection. Chez GRTgaz, « nous avons reçu environ 70 demandes, indiquait Philippe-Jean Garnier, directeur de l'offre début juin. Elles nous intéressent à partir d'un débit de 500 m3 /h. Nous prévoyons de transporter 3 TWh de biométhane dans notre réseau en 2020 (à comparer à 650 TWh de gaz transportés en 2011). » Mais ce mode de valorisation ne s'entend que pour des sites implantés à proximité d'un réseau de gaz naturel. Ce qui est rarement le cas en rase campagne. Cela dit, « il est toujours possible de déplacer le méthaniseur pour se rapprocher du tuyau, pointe Philippe-Jean Garnier. C'est la collecte des déchets qui est locale, pas forcément le traitement et la valorisation. » L'absence d'un réseau de gaz naturel, à Auch (32), a immédiatement orienté la collectivité, qui construit actuellement une unité de méthanisation de biodéchets, vers les valorisations thermique et électrique. « Pas le biogaz carburant, car il n'y a pas de flotte de véhicules intéressée dans la région », précise Marc Bauzet, du bureau d'études Naskeo Environnement. La chaleur sera utilisée par l'une des industries détentrices de déchets à méthaniser, un schéma d'économie circulaire qui est aussi celui de l'entreprise Fonroche, à Villeneuve-sur-Lot (47) : une usine voisine d'aliments pour chiens et chats alimentera le méthaniseur en déchets, lesquels donneront de la chaleur (1 MW) que l'usine utilisera dans son process. « La chaleur est effectivement le facteur limitant dans tout projet de valorisation du biogaz », expose Caroline Marchais, déléguée générale du Club biogaz de l'ATEE. Passer par un réseau (d'électricité, de gaz) a l'avantage de découpler production et consommation. Si l'on fait cette économie, il faudra s'assurer que l'on produit de la chaleur au moment où notre acheteur local en a besoin. Or, les petits métha-niseurs sont ceux où la saisonnalité de la production est la plus variable. Ils doivent donc s'assurer que leur utilisateur de chaleur a la même saisonnalité, tout au moins d'envisager un autre exutoire s'ils produisent au moment où il n'y a pas de consommation. » Caroline Marchais prend l'exemple du méthaniseur installé chez un éleveur de bovins, qui ne produit pas de biogaz l'été, donc pas de chaleur, quand le troupeau est aux champs. Tant mieux, car en été, il n'y a pas besoin de chaleur pour chauffer les bâtiments agricoles. Ni possibilité d'injecter du biométhane dans le réseau de gaz naturel, car à cette époque où personne ne se chauffe, les réseaux sont pleins. Dans ce cas, les saisonnalités coïncident. Mais, pour un méthaniseur de déchets verts, c'est l'inverse : les grosses productions du printemps et de l'été donneront de la chaleur qui aura du mal à trouver preneur. C'est pour s'affranchir de cette saisonnalité que l'usine de méthanisation de Forbach (57) s'est connectée au réseau de gaz naturel, à la fois en biométhane et en bio-GNV. Choisir son mode de valorisation du biogaz est donc une équation à plusieurs inconnues, qui rend indispensable l'accompagnement d'un projet par un bureau d'études. 3 Valoriser les sous-produits La méthanisation n'est pas qu'une valorisation énergétique d'un déchet. C'est aussi une valorisation matière, car il en sort deux produits : les composts et les jus. Les professionnels de la méthanisation ont l'embarras du choix en termes de valorisation énergétique (chaleur, électricité, carburant, biométhane), mais pas en termes de valorisation matière. Les sous-produits d'un méthani-seur prennent tous la direction du compostage. À Arras, le nouveau site de méthanisation de Veolia Propreté jouxte la plate forme de compostage de Sede Environnement, laquelle accueille 7 000 t/ an de digestat. Un exutoire parfaitement logique, puisque la méthanisation participe de cette boucle vertueuse prônant le retour du carbone au sol. « Nos sols ont un besoin impérieux de matière organique », alerte Dominique Rodriguez, président de la Fédération nationale des collectivités de compostage (FNCC). Mais entrer dans un processus de compostage suppose d'en sortir avec tous les critères de qualité que l'opération suppose pour prétendre à un épandage agricole. « La filière des biodéchets ne tient que si le compost produit est d'excellente qualité », martèle Yves Coppin, président du collège valorisation biologique de la Fnade. En l'occurrence, s'il respecte la norme NFU 44-051. Mais, pour les digestats de méthanisation, c'est presque un luxe : la méthanisation elle-même a déjà éliminé les germes pathogènes et également les indésirables (à l'étape de prétraitement, ou de tri dans le cas d'un TMB) qui sont listés dans la norme. En somme, on impose une usine à gaz à ces matières alors qu'elles pourraient être valorisées au sol en l'état. « Aujourd'hui, tous les produits de méthanisation s'orientent vers un compostage des digestats, dans le but d'obtenir la norme NFU 44-051, qui les rend utilisables en épandage. Pourquoi n'y aurait-il pas une norme pour le digestat brut, en phase liquide, de manière à le rendre valorisable tel quel en épandage agricole ? », s'offusque Yves Coppin. À en croire les professionnels, un digestat de méthanisation est donc au moins d'aussi bonne qualité qu'un compost de biodéchets collectés sépa-rativement. Pire : ce dernier est en passe de sortir du statut européen de déchet, mais pas le digestat. Alors qu'il fait quelque chose que le compost ne fait pas : il constitue un apport hydrique intéressant pour les cultures en période de sécheresse. En Bretagne, le coup de gueule de la filière s'est transformé en appel à projets. L'association Aile (Association d'initiatives locales pour l'énergie et l'environnement), le réseau Trame (Tête de réseau pour l'appui méthodologique aux entreprises) et la chambre d'agriculture ont lancé pour trois ans le programme Valdipro, destiné à créer un marché du digestat comme fertilisant agricole naturel. « Nous avons exclu de notre champ d'action les diges-tats contenant des boues de Step et les déchets ménagers non triés à la source, afin de se concentrer sur les produits théoriquement les plus faciles à mettre sur le marché », explique Aile. Valdipro s'est choisi une cible privilégiée : les agriculteurs. Au programme : caractérisation des produits à homologuer et création d'outils méthodologiques pour accompagner les agriculteurs méthani-seurs vers la mise en marché de leur digestat. L'objectif suprême est, bien entendu, de donner une valeur positive, non anecdotique, aux produits épandables issus des processus de traitement biologique des déchets, ici la méthanisation. « La vertu première du compost, c'est sa valeur fertilisante, en tant que matière qui retourne au sol. Aujourd'hui, le compost est donné gratuitement ou vendu très peu cher, ce qui revient à brader cette valeur », regrette Marc Cheverry, chef du département gestion optimisée des déchets à l'Ademe.


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