Après sept ans de recherches, le projet Futurol arrive en phase d’industrialisation et de commercialisation, et prépare pour cela l’implantation d’une ligne de prétraitement sur le site de Tereos à Bucy. Le projet avait été lancé en 2008, avec plusieurs partenaires* et un budget de 76 millions d’euros. Depuis 2011, un prototype fonctionne sur la bioraffinerie de Pomacle-Bazancourt, dans la Marne.
« Il a permis de valider la flexibilité du procédé, qui peut aussi bien utiliser le peuplier que le miscanthus ou la paille de blé. D’autres matières premières seront testées dans l’unité de Bucy », indique Anne Wagner, présidente du projet Futurol et directrice de la R&D de Tereos. Une versatilité qui évite les coûts de stockage et permet de choisir la matière première la moins chère pour alimenter le procédé. La production in situ d’enzymes (pour dégrader la biomasse en cellulose, hémicellulose et lignine) et de levure (pour produire l’éthanol) a également été validée. « Le procédé, comportant peu d’étapes, est performant. Le rendement de conversion de la biomasse est de plus de 30 %, contre 25 % jusqu’à présent. De plus, les unités seront autonomes en énergie grâce à la combustion de la lignine », précise Anne Wagner.
Le pilote de Bucy doit désormais valider les coûts de production de l’éthanol, avec en ligne de mire un prix de revient de 0,5 centime/litre d’éthanol. Sur le prototype, ils sont entre 0,5 et 0,7 centime/litre. A l’issue de cette phase, le procédé complet sera commercialisé, sous forme de licence, par Axens (filiale d’IFPen). Il pourra soit être intégré dans des bioraffineries existantes, soit dans des unités créées ex-nihilo. La capacité de production des unités de taille industrielle sera situera entre 10 000 et 30 000 m3 d’éthanol par an. « Et notre procédé peut être utilisé pour produire d’autres composés comme du butanol, du butanediol ou de l’acide succinique », complète Anne Wagner.L’autre projet est porté par la Compagnie industrielle de la matière végétale (CIMV), qui va investir 55 millions d'euros dans un laboratoire de recherche et un démonstrateur industriel installés dans le parc d'activités des Portes du Tarn, près de Toulouse. Elle y testera à partir de 2016 son procédé de bioraffinerie, préalablement validé au stade du pilote industriel, dans le cadre du projet européen de démonstration « 2G-Biopic » qui lui apporte une subvention de 20 millions d'euros.
Dans cinq ans, Thierry Scholastique, PDG de CIMV, et Michel Delmas, directeur scientifique et professeur à l'Institut national polytechnique de Toulouse, espèrent proposer du bioéthanol produit à partir de pailles ou de résidus de bois. « Notre procédé qui permet de libérer, sans les dégrader, la totalité des sucres et de la lignine présents dans la matière végétale. Pour faire la séparation, nous utilisons en effet des acides acétique et formique, ainsi que de l'eau», explique Michel Delmas. «La lignine, qui constitue le quart de la matière végétale, a des propriétés telles qu'on peut l'utiliser pour remplacer le phénol, une partie des composants du polyuréthane et ceux qui composent le caoutchouc. Tous produits à partir du pétrole. On peut imaginer que dans les 30 ans qui viennent, la lignine composera 10 à 50 % de tous les plastiques du monde», poursuit Thierry Scholastique.
CIMV travaillera en synergie la plateforme Toulouse White Biotechnology (TWB) qui va l'accompagner dans l'optimisation des procédés de fermentation et de la production de la plupart des molécules du quotidien issus du pétrole.
* ARD, IFP Energies nouvelles, INRA, Lesaffre, Vivescia, Office national des forêts, Tereos, Total, Crédit Agricole du Nord Est, CGB, Unigrains
CW et AC