Véritable Arlésienne de la transition énergétique, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) vient d'être adoptée par décret. Ce document stratégique trace filière par filière les principaux objectifs énergétiques aux horizons 2018 et 2023. Il a donné lieu à de très nombreuses consultations, dont celle portant sur une nouvelle version du projet ouverte au public jusqu'au 15 octobre dernier. Rien que pour cette dernière consultation, 5.323 commentaires sont rencensés par le ministère de l'Environnement.Initialement prévue au premier semestre, la publication de la PPE a connu un premier report, avant que le gouvernement ne revoie sa copie suite à la lecture critique de plusieurs organismes (Conseil national de la transition écologique, Conseil supérieur de l'énergie, Autorité environnementale, comité d'experts). Le décret contient des objectifs quantifiés de déploiement des énergies renouvelables, chiffres en réalité déjà dévoilés en avril 2016. On y trouve aussi un « calendrier indicatif des procédures de mise en concurrence » pour les énergies renouvelables. En revanche, certains volets thématiques théoriquement annexés à la PPE, accessibles sur le site du ministère, ne figurent pas expressément dans le décret. C'est le cas de la stratégie de développement de la mobilité propre (SDNMP).Le 26 octobre, la mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'application de la loi de transition énergétique a vivement critiqué la PPE. Un document « dont on a fait à tort le pilier de l'application de la présente loi ». Les députés ont dénoncé le retard pris dans l'élaboration de la PPE. La première période de la programmation s'achève en effet… dès 2018. Dans ces conditions, la paution tardive de la PPE « est-elle en phase avec ce calendrier ? », s'interroge la mission parlementaires. D'un point de vue juridique, c'est la forme même du document, « un décret simple », qui est remise en cause. Le caractère réglementaire de la PPE « prive le Parlement d'un examen », déplorent ainsi les députés dans leur rapport.Pire : la PPE est aussi une occasion manquée de clarifier les choix futurs, en particulier en détaillant mieux comment la France entend réduire de 75 à 50% d'ici 2025 la part du nucléaire dans le mix électrique. Certes, la PPE prend acte de la parution avant la fin 2016 d'un décret de fermeture des deux réacteurs de Fessenheim (Haut-Rhin). Mais elle reste floue sur d'éventuelles autres fermetures et sur les prolongations d'exploitation au-delà de 40 ans de certains réacteurs. Le décret s'en remet à EDF en lui demandant d'établir, « dans un délai maximal de six mois », un plan stratégique « compatible » avec les orientations de la PPE. La programmation devra être revue en 2018, puis tous les cinq ans. La fourchette anticipée de baisse de la production d'électricité nucléaire pourra alors être révisée, d'après le dossier joint à la PPE sur le site du ministère, « en fonction de l'augmentation de la production renouvelable et des efforts d'efficacité énergétique ». L'occasion de corriger le tir ?Philie Marcangelo-Leos