Si les risques associés à l'ingestion ou à l'inhalation de tel ou tel polluant sont relativement bien documentés, il n'existe encore rien sur l'exposition globale de l'homme aux différents polluants présents sur un territoire et dans des milieux aussi variés que les sols, l'air ou l'eau. Combler ce manque est l'objectif de la plateforme Plaine, pour plateforme intégrée pour l'analyse des inégalités d'exposition environnementale, élaborée par l'Ineris. « Cet outil met en relation des données diverses : le cumul des expositions à des polluants de nature et de source différentes, des données sur le mode de vie comme l'autoconsommation des cultures du potager ou le temps passé sur le territoire », explique Céline Boudet, responsable de l'unité impact sanitaire et exposition au sein de la direction des risques chroniques de l'Ineris. À la clé, une carte des risques. Et même deux : l'une signalant les doses journalières d'exposition (portant sur l'ingestion des polluants) et l'autre représentant la combinaison de l'exposition par inhalation et par ingestion. Des outils aussi bien à destination du grand public que des professionnels. Ces travaux contribuent à l'évaluation des inégalités environnementales. Aujourd'hui, elle est effectuée sans intégration spatiale et sans lien avec les outils de modélisation des risques. L'enjeu est donc de spatialiser l'exposition aux risques. « Ce type d'approche est préconisé dans les études de zones, car elle permet d'identifier des points noirs environnementaux contre lesquels le deuxième Plan national santé-environnement (PNSE2) veut lutter. C'est également une méthode d'optimisation des études d'investigation locales et de capitalisation des données », poursuit Céline Boudet. Dans ce projet, l'Ineris s'est heurté au manque des données, à la fois lacunaires et hétérogènes, éparpillées dans différentes bases de données : Basias et Basol pour les sols pollués, l'Ineris pour l'air, les agences de l'eau, l'Insee pour les données sur la population, le SOES pour l'occupation des sols, etc. De plus, certaines données existent à l'échelle nationale, d'autres au niveau régional ou encore local. Et non seulement ces données sont cloisonnées, mais les systèmes informatiques qui les hébergent ne sont pas interopérables. Les rendre compatibles était le but de la thèse de Julien Caudeville, soutenue en octobre 2011, qui a ainsi démontré la faisabilité d'une plateforme de géomodélisation. Concrètement, un modèle numérique d'exposition multimilieu a été développé et intégré dans un système d'information géographique (SIG). « Ce travail, qui fait l'objet de trois publications scientifiques, pose la base d'une méthode robuste et cohérente d'évaluation de l'exposition de l'homme, applicable à un territoire », souligne Céline Boudet. Plaine recense, pour l'instant, la présence de quatre polluants (nickel, cadmium, chrome, plomb) dans deux régions, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie. Les données datent de 2004 et ont vocation à être actualisées. Ce travail sera étendu à d'autres régions - il a débuté en l'Ile-de-France, Bretagne et Rhône-Alpes - et à d'autres polluants. Par exemple, l'Ineris travaille avec les agences régionales de santé pour coupler ses données avec des paramètres socio-économiques.